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Auteur des «sept fantômes de Hassina»

Saïd Boucetta : le romancier qui ose!

C’est l’histoire d’une femme décidée de briser les chaînes de l’aliénation. Une histoire où la réalité le dispute au surnaturel…

Prouesse! Le roman de Saïd Boucetta ne laisse pas indifférent. Il est question de «djenounes» (démons). De «messkounines» (habités par les démons). Les plus sensibles seront servis. L'auteur nous promène alternativement de la réalité au monde surnaturel. À la clé de fortes sensations au fil des pages. Hassina, cette jeune femme, personnage central du livre, est partagée entre le monde réel et ses délires. Elle n'en finit pas, jusqu'au bout, de nous transmettre les dures tranches de sa vie qui mettent les capacités sensitives du lecteur à rude épreuve. Les mots sont durs. Sans fard. Directs au point de nous surprendre avant de nous entraîner dans le monde des fantômes qui a happé Hassina. On se surprend même à vivre ce monde maléfique décrit avec prouesse par l'auteur. De quoi s'agit-il? Et quelle est la trame qui nous est offerte? C'est l'histoire d'une famille algérienne qui a très mal vécu la nuit coloniale. Un mal dû à l'impréparation de l'immense joie de la liberté recouvrée le 5 juillet 1962. Une liberté sans transition. Sans accompagnement psychologique pour extirper un siècle et demi d'enfer. Comme un retour spatial au contact de la couche atmosphérique. Où tout va brûler et décimer la famille. Le passage du monde rural au monde urbain est plus que jamais problématique. Hassina n'en fait pas un débat philosophique. Elle veut sa liberté. Elle ambitionne de changer sa condition féminine. Elle y mettra toute son énergie. Parallèlement, ses proches disparaissent les uns après les autres emportant avec eux des pans du passé. Seule Hassina leur survivra. Une orpheline certes, mais forte de caractère. Elle aspire, ni plus ni moins à atteindre son émancipation rejetant le diktat des mâles de sa famille. Les obstacles qui se dressent devant elle la malmènent au point de se retrouver suivie médicalement par un praticien et «probable» demi-frère qu'elle découvre sur le tard. Elle traverse ainsi toutes les époques post-indépendance. Le 5 octobre. La décennie noire. Le hirak. Toujours sans accompagnement psychologique. Alors qu'il est recommandé, même pour un simple accident de la route, un soutien psychologique. La longue période coloniale avec son lot d'analphabètes, d'esclavage, de soumission, de misère, d'humiliation, a laissé chez la famille de Hassina de graves séquelles. La longue période coloniale avait fini d'achever, notamment, la condition féminine. Et personne pour penser à une thérapie à prescrire pour ce mal profond mis à nu par l'indépendance. Encore, fallait-il avoir les moyens de cette thérapie en 1962 et disposer de médecins algériens à l'époque. Des séquelles visibles sur des esprits délabrés. L'auteur du livre, plante très bien le décor. Il décrit une famille algérienne esclave, taillable et corvéable à l'extrême par les colons. L'homme est berger et la femme bonne à tout faire chez l'occupant. L'analphabétisme hérité de la colonisation laisse peu d'espoir d'en sortir un jour. Pourtant, Hassina est ambitieuse. Si ambitieuse qu'elle nourrit secrètement le projet de briser ses chaînes. Des chaînes tenues solidement par les mâles de la famille. Le père, les frères, les cousins et même les voisins. De prime abord, le projet de Hassina apparaît utopique. Au fil du temps et tandis que la mort emporte un à un les membres de sa famille, Hassina décide d'apprendre à lire et a écrire. Elle suit les cours du soir mis en place pour les adultes à l'époque. Des moyens d'urgence car le pays traverse de pénibles périodes. Parmi elles la dure reconstruction du pays en l'absence de ressources humaines qualifiées. Une réalité qui a vu se former le terreau propice aux luttes idéologiques, voire identitaires comme lors de la décennie noire. Hassina et sa famille ou ce qu'il en reste après de tumultueuses disparitions (qu'on vous laisse découvrir) de ses membres, ne parvient pas à émerger de ses délires. Des délires qui défigurent jusqu'à la voix de Hassina et que décrit avec brio Boucetta jusqu'à couper le souffle du lecteur. On arrête là le compte rendu. On ne donnera pas, non plus, le dénouement inattendu du roman. Le sujet dont s'est emparé Saïd Boucetta est très difficile à en cerner tous les aspects. Le surnaturel et les fantômes de Hassina ne sont qu'une partie de l'extraordinaire histoire d'une famille rurale algérienne propulsée vers l'urbanité. Les sociologues, les psychologues, les historiens, tous les spécialistes des sciences humaines y trouveront matière à débat. Saïd Boucetta a mis toute son expérience, toute sa culture générale, accumulées durant les décennies de journalisme pour écrire son premier roman. Tout comme les spécialistes, le large public appréciera les «fantômes» que l'auteur «invite» dans son livre. Mais pas que. Le monde du cinéma a, dans ce livre, une adaptation d'une oeuvre au succès garanti. Pour son premier roman, Saïd Boucetta a réussi, avec «les sept fantômes de Hassina», un véritable coup de maître!


«Les sept fantômes de Hassina» de Saïd Boucetta. 172 P. éditions Haya

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