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MEDIA GRAND PUBLIC

La télévision algérienne éduque-t-elle?

Il est admis que les médias détiennent un pouvoir non négligeable au sein des sociétés modernes.

Comme la langue d'Esope, la télévision peut «tuer» l'espoir vital d'une société comme elle peut faire épanouir ses citoyens. D'où la formule consacrée des deux «L» (en réalité il y en a trois)- et qui sont: lécher pour plaire et lyncher pour tuer symboliquement. Dans notre pays, la télévision publique est devenue orpheline de son monopole. Elle se voit concurrencée par des télévisions privées dont certaines ne se privent pas de traduire dans les faits la devise des 2L, audimat biaisé oblige. Et pourtant, tout média doit se conforter à un code d'éthique et de déontologie afin de ne pas tomber dans l'excès de cette liberté d'expression lequel (l'excès) est - ô combien - préjudiciable à la cohésion sociale. Du principe basique que l'éducation vise à l'épanouissement moral, intellectuel et culturel, on devine aisément le rôle éducatif de la télévision, de la radio et du journal. Quid de l'Algérie? Loin de nous l'idée de noircir totalement le tableau audiovisuel du pays. Seulement des exemples nous donnent à réfléchir et surtout à émettre de sérieux doutes.
Qu'on en juge par ces spots de publicité qui massacrent les langues en usage au sein de notre société et notre école. Passant en boucle à toute heure de la journée, des slogans de téléphonie mobile, de marques de café ou d'autres produits déroutent nos écoliers. Ces derniers découvrent que leur langue de travail, l'arabe, est latinisée dans sa graphie et sabirisée dans son vocabulaire (arsell, idoom, dernaha, bladi fi kalbi...). Tout comme le français est arabisé dans son lexique. Ils ne savent plus où est le bon exemple lexical ou graphique. Ces messages publicitaires passés à la tronçonneuse servent de renforcement à ces mauvaises habitudes pédagogiques parfois héritées par l'élève en classe.
Que dire de ces atteintes portées à la santé publique par des scènes télévisées - payées grassement - montrant des enfants, souvent en très bas âge, à qui les parents servent des boissons gazeuses et des sucreries, des salaisons (le cachir), des pizzas dégoulinant de gras et de sel. Les annonceurs et les relais médiatiques occultent superbement les sonnettes d'alarme des services de santé de par le monde. Face aux maladies en tout genre, les médecins nutritionnistes exigent que les médias participent à la sensibilisation autour des méfaits de ces aliments sur la santé des personnes - et particulièrement des plus fragiles, les enfants. Il est vrai qu'une oreille dopée au tintement de la monnaie n'a point de conscience.
Sur le plan moral, des atteintes sont monnaie courante. Elles confortent l'ancrage et la diffusion à large échelle de réflexes, d'idées et de comportements contraires au sacro-saint principe du «vivre ensemble» alimenté par la tolérance et le respect de la différence sexuelle, linguistique ou religieuse. Ainsi, cette marque de café commençant et se terminant par la lettre «a» propose une tombola pour gagner -pas moins! - une voiture («siyaarra») et une épouse («â3rossa»). Voilà nos femmes et nos filles confortées dans le statut d'objet de désir et pas plus. Quelqu'un s'est-il offusqué de cette atteinte à leur dignité? Les associations de défense de la femme, des droits de l'homme n'ont pas levé le petit doigt pour dénoncer cette campagne publicitaire haineuse. A nos enfants ces spots enseignent la minorisation du genre féminin relayant en la renforçant davantage cette attitude misogyne (ou machiste) déjà amplifiée par l'école et les intégristes religieux.
Toujours dans le registre de l'insulte au «vivre ensemble», le summum est atteint par les clowneries de ce journaliste qui sévit dans une télévision privée. Après le plat quotidien de sa haine de la langue française et de la France, peuple et régime politique amalgamés - sans oublier les Algériens francophones, qu'il qualifie de «queue» de la France - le voilà qu'il s'attaque aux chiites. Dans son émission de ce vendredi 17 Juin après le tarrawih, il nous montre une vidéo d'un rassemblement d'Iraniens ou d'Irakiens en pleine cérémonie de recueillement pour l'enterrement d'un des leurs décédé. Comme de bien entendu ces personnes ont leur propre rite et cérémonial. Rien de blessant ou de malsain: c'est là leur culture et leur interprétation collective. Une personne respectueuse d'autrui et dotée d'un esprit sain n'aurait pas relevé cette différence de rite. Elle la respecterait.
Non content de brocarder les participants à cet enterrement chiite, notre journaliste (l'est - il vraiment?) s'est lancé dans une diatribe avec ces cris de guerre - gestes et voix en écho à la teneur des paroles: «Non! Les chiites, les yazidites, les ahmadites (et d'autres communautés citées pèle- mêle) ne s'installeront jamais en Algérie, pays de 1,5 million de martyrs...» A ce rythme où va son intolérance, il y a lieu de se demander ce qu'il pense vraiment des Algériens ibadites, chrétiens, juifs, voire des athées qui sont des Algériens pur jus. Sait -il seulement qu'en Irak, les yazidites et d'autres communautés religieuses sont massacrés dans des boucheries humaines sans nom? Voilà comment la télévision, à des heures de grande écoute, distille l'intolérance et la haine d'autrui parce qu'il est différent. Voilà comment la télévision et les autres médias creusent en profondeur - il est déjà tracé depuis des décennies - le sillon de l'intégrisme sanglant et totalitaire. C'est de la sorte que le nazisme, le fascisme italien et le stalinisme ont formaté leurs adhérents - à commencer par les plus vulnérables: les enfants et adolescents. Le peuple algérien ne connaît que trop bien les résultats de leur macabre opération d'éducation des masses. Les pères de famille soucieux de la bonne éducation attendent des autorités habilitées à ce qu'elles mettent fin à ces agissements contraires à notre Constitution, à notre culture. Des émissions de ce genre encouragent - si elles ne créent pas - la radicalisation et l'extrémisme.
L'urgence est signalée de protéger nos enfants de ce type de médias donnés en jouet diabolique à des mentalités qui ne pensent qu'audimat et...fric sale.

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