Les vicissitudes de la FAF

Depuis sa création en 1962, la FAF a tout connu, tout vu, tout subi. Et si aujourd´hui elle est en si piteux état, c´est parce qu´elle a été plus violée que conquise. Oui, violée, c´est bien le mot dans toute sa crudité et sa cruauté. Excessif ce qu´on dit? C´est possible, mais franchement comment peut-on qualifier une situation ubuesque, kafkaïenne depuis plus de trente ans. Oui, nous avons bien dit une trentaine d´années. Exactement depuis le retrait, après six ans de service, du Dr Mohand Maouche, ci-devant premier président de la FAF. Tous les témoignages font ressortir sa capacité de rassembler - chose rare par les temps qui courent - qui lui permettait de réunir à la même table deux antinomes. Homme de dialogue, de culture, il était aussi et surtout un homme d´action. C´est bien lui qui a remis sur les rails le football algérien. Il avait la vision. Membre influent de la CAF, ses qualités faisaient de lui le successeur tout désigné du président Tessema. Hélas un tragique accident d´avion bloqua net cette ascension. Le football algérien ne s´est pas relevé. Car depuis Maouche, qu´avons-nous eu? Des présidents intelligents certainement, mais des courageux combien y en a-t-il eu? Des courageux qui ont une vision et un projet, non pas des téméraires dont on prend souvent la «redjla» pour du courage. Pas beaucoup. Ou pas du tout. C´est selon. Si on prête l´oreille à ceux qui ont occupé le poste, sûr qu´ils feront valoir de bonnes excuses: immixtion de la tutelle et des grosses légumes, freins de toutes parts, absence de liberté de manoeuvre, mais qui l´avait à l´époque de la pensée unique? Vrai, tout cela, mais question : étaient-ils ligotés à leur fauteuil? Entre se soumettre ou se démettre, ils auraient pu choisir la sortie la plus digne. Mais non, la plupart sont restés accrochés à leur poste, criant qu´ils souffrent le martyre, mais ne pouvant faillir au devoir. Et le devoir, bien entendu, les obligeait à rester vissés à leur poste jusqu´à ce qu´on les éjecte parfois brutalement. Il est beau le «devoir» quand il est convertible. Et c´est parce qu´il est convertible (plus que l´euro et le dollar) que le poste de président de la FAF est si recherché. C´est Rachid Mekhloufi, président intérimaire, à la fin des années 80 si on ne n´abuse, qui a le mieux qualifié le monde de la FAF. Pour lui c´est un monde irrationnel qui génère des rapports irrationnels. «Et comment pourrait-on travailler efficacement dans l´irrationalité?», nous avait-il confié à l´époque. Il a rempli son intérim et puis ciao les amis. «Même à la tête de l´équipe nationale, je n´ai pas vu autant de pressions. C´était hallucinant.» Hallucinant, c´est bien le terme. Connaissant Ighil et Raouraoua, sachant surtout qu´ils sont des hommes de raison et d´analyse faisant du précepte cartésien « bien juger pour bien faire », une règle d´action, on s´est dit qu´il y a quelque part maldonne. Et puis ils se sont retirés s´inscrivant ainsi dans la rationalité. Et la raison dit que tant que le cadre rationnel fera défaut à la FAF, il n´y aurait point de salut. Le cadre rationnel? Il concerne les candidats. On ne se présente pas la fleur aux dents. Les critères doivent exiger la confection d´un projet qui résumera la vision et les ambitions du candidat pour la relance du football national. Sur un autre plan, il faudrait que tous ceux qui piloteront l´AG élective soient assez forts pour faire respecter l´ordre et la loi. Et puis revoir la composante de la base élective pour qu´elle ne soit pas sensible aux promesses des candidats. Tout cela est affaire d´homme et de courage. «Je cherche un homme», a dit un philosophe antique. 2400 ans plus tard, cette quête est toujours d´actualité dans l´Algérie de 2001.