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«La musique autrement» de Mouloud Ounnoughene

«La musique révèle nos états d'âme»

«La musique autrement, de la note à la thérapie» est son titre. Le nouvel ouvrage du docteur Mouloud Ounnoughene, neurochirurgien et musicien-compositeur, vient de paraître aux éditions Dar El Khettab. «La musique autrement, de la note à la thérapie», est un livre didactique et explicatif de l'intérêt et des implications thérapeutiques de la musique dans le soin de certaines maladies. L'auteur, qui a déjà écrit sur le thème, y traite, entre autres, le langage musical, l'effet Mozart ainsi que les éthos des modes à travers les époques. Le point d'orgue est mis sur le modus operandi du traitement neuronal de la musique par le cerveau depuis sa perception jusqu'au processus émotionnel qu'induit son esthétique. Un ouvrage d'une grande érudition, à lire...

L'Expression: Quelle est votre «autre» lecture de la musique?
Docteur Mouloud Ounoughene: Au-delà de l'esthétique véhiculée par la musique, cet art possède une puissance immanente et présente une compétence cognitive qui mobilise plusieurs régions de notre cerveau. La musique est susceptible de «remodeler» notre cortex, en modifiant ses connexions nerveuses. Ce phénomène de neuroplasticité dû à une activité gliale est notamment utile lors de la phase de récupération de lésions encéphaliques. Il est prouvé que la pratique soutenue de la musique accroît les zones du cerveau en rapport avec l'exercice de cet art. La musique est un adjuvant thérapeutique intéressant qui accompagne entre autres, l'orthophoniste dans la rééducation d'un trouble de l'élocution causé par un AVC; la mise en oeuvre de «la thérapie mélodique et rythmée» chez ces patients est aujourd'hui validée scientifiquement. Les fonctions cognitives de l'alzheimérien seront stimulées par une pratique musicale régulière, et ce, malgré une réserve mnésique hippocampique amoindrie. Les mélodies familières ou celles entonnées durant l'enfance persistent assez souvent car elles présentent une robustesse neuronale. De même, l'enfant autiste trouvera dans la pratique réglée d'une activité musicale une aide appréciable en fonction de la sévérité des symptômes qu'il présentera. En définitive, la musique est un esperanto d'émotions qui agit comme un révélateur de nos états d'âme enfouis. Il n'est jamais trop tard pour apprécier, apprendre ou découvrir la passion de la musique.

La musicothérapie a existé depuis très longtemps, les Grecs la pratiquaient déjà, n'est-ce pas?
L'homme a toujours cherché à exorciser ses angoisses et à rétablir un équilibre entre son soma et son psyché. Depuis les temps les plus lointains, le son, la voix et la musique ont été utilisés pour embaumer les fêlures de l'âme. Ainsi, les modes musicaux grecs sont suggestifs d'états d'âme ou de teinte d'un sentiment, ce qui représente le principe même de l'éthos. Bon nombre de ces modes font souvent référence à une peuplade ou à une région, comme c'est le cas d'ailleurs pour certains maqâms et noubas. Chaque mode fait sourdre la manière d'être d'un individu. Les pythagoriciens vouaient une place particulière au chapitre de l'éthos des modes dans l'enseignement de la musique, leur connaissance contribuera à l'amélioration de l'état de l'individu. À titre d'exemple, le mode dorien qui est considéré comme le mode du génie de la Grèce antique, crée un sentiment de joie et de sincérité.Le mode phrygien, dont la terminologie fait référence à une petite principauté d'Asie mineure présente une harmonie bachique et enthousiaste, selon l'abbé Wartelle, alors que Platon pense que ce mode est propre à exciter les vertus guerrières....

Qu'en est-il d'Al Farabi et des autres savants anciens sur l'ethos des modes et la musicothérapie?
Le philosophe musulman médiéval, d'origine persane, Al Farabi (872-950) qui est qualifié de second maître, (le premier étant Aristote) est un érudit qui cultivait un intérêt particulier pour les livres d'Aristote, il s'est aussi imprégné d'éléments platoniciens. Il faut savoir, par ailleurs, que les savants grecs ont souvent été nourris par les prêtres de l'Egypte antique. Al Farabi est considéré comme l'un des plus grands théoriciens influents au Moyen Âge. Pour lui, l'art musical stimule et éveille des torrents d'émotion et génère des stimuli de l'imaginaire. Dans son «Kitab el musiqi elkabir» ou le grand livre de la musique, l'érudit pense qu'une des formes de la musique s'inspire de nos passions, de notre état d'âme; l'homme émettra une teinte vocale qui variera en fonction de son état d'âme du moment, ils «révéleront» ainsi son émotion. Ce sont là, des éléments de musicothérapie réceptive ou passive, tels qu'ils sont proposés à notre époque. Dans sa démarche, Al Farabi utilise des maqams à des fins thérapeutiques: le Rast donne du confort, le Husseyni induit la quiétude et le Zirgule contient des vertus soporifiques. Dans son ouvrage «echiffa», Ibn Sina (980-1037) compare les battements du coeur aux pulsations du rythme. Il a aussi écrit son célébrissime «el qanoun» qui a influencé le monde médiéval occidental où il évoque les sentiments de pureté et d'élévation qu'induit la musique. Al Kindi qui a été influencé par Hippocrate a établi la théorie qui repose sur la circulation des quatre humeurs (liquides) dans notre organisme. La prédominance d'un des fluides définit le tempérament de la personne en question. En alliant la psychologie à l'art, il fait correspondre chaque corde de son luth à un tempérament... Enfin, chez Safieddine al Urmaoui, génial joueur de luth, chaque organisation modale exerce une influence sur l'âme de l'individu. C'est une approche cognitive de la musique: «le maqam Isphahan stimule l'intellect, aiguise les pensées, oblige les gens à se concentrer dans leurs études...», C'est ce qui est rapporté dans un commentaire anonyme de son Kitab el adwar...

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