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L’Algérien et l’amour ou l’amour algérien

Nos sages ancêtres disaient: « Les enfants nés d'une relation d'amour sont toujours beaux!».
Beaucoup de haine nous entoure dans ce monde «moderne»affolé par les guerres et les injustices.
On tolère la haine et on fait la guerre à l'amour.
Nous possédons un riche patrimoine de littérature d'amour, mais notre mémoire collective est défaillante. Elle est criblée. Dans la vie, souvent on oublie les histoires d'amour, l'art de l'amour, la littérature de l'amour, et on se rappelle des détails de la guerre. On oublie les amants et on se souvient des guerriers. Les blessures des guerres ne se guérissent que par l'ode de l'amour.
Si vous le savez, nous sommes les héritiers d'une grande bibliothèque de livres écrits sur l'amour par des brillants littérateurs qui ont vécu les souffrances de l'épreuve de l'amour.
Poétiquement parlant, nous sommes les descendants du grand poète Abdallah Ben K'riou el Aghwati. Un poète populaire exceptionnel, un génie, qui parmi nous n'a pas lu ou n'a pas écouté chantés quelques-uns de ses merveilleux poèmes tels «Lune de la nuit» (Gamr ellil), «Le juge de l'amour» (Kadhi el hob), «el-Menia» (el Meniâ), «Ya Sailni» (Oh mon questionneur) et d'autres perles. Ben K'riou le soufi, le feqih n'a jamais caché son amour pour sa bien-aimée Fatna Al-Zaanouniya. Une histoire d'amour ensorcelante restée tatouée dans l'Histoire de la passion.
Nous sommes les légataires du patrimoine poétique d'amour des poètes tels Mohamed Ben Guitoun, d'Abdelkader el Khaldi, de Ben M' ssaieb, de Si Mohand Ou Mhand.
Nous sommes les enfants littéraires du fameux roman, intitulé «Hikayet Al ouchchak fi el hobbi wa el ichtiyak» (Histoire d'amoureux dans leur passion et dans leur nostalgie» de Mohamed ibn Brahim ibn Mustafa Pacha, le dernier prince d'Algérie (1806-1886). Écrit dans un arabe algérois, en 1849, est considéré comme le premier roman dans l'histoire de la narration littéraire algérienne. L'auteur présente, à travers une histoire d'amour, les coutumes d'Alger, sa géographie émotionnelle et civilisationnelle dans la première moitié du XIXe siècle.
Aujourd'hui, nous nous trouvons coupés de notre histoire littéraire. Nos enfants à l'école, nos étudiants à l'université, ne connaissent rien ou très peu de toute cette belle littérature libre et populaire.
Nous sommes les héritiers d'un arbre généalogique littéraire conçu dans une écriture pleine d'élégance, armée d'audace, et gorgée de respect envers la femme. Aujourd'hui, cette narration libre et libératrice est bannie de notre registre culturel. De temps en temps, timidement, elle nous réveille de notre sommeil culturel, de notre ignorance intellectuelle. Cette narration littéraire populaire représente une sorte de résistance culturelle et littéraire face à toutes les répressions idéologiques religieuses fanatiques ou politiques chauvines. Nous vivons une sorte de rupture violente, plutôt une ablation civilisationnelle, vis-à-vis de notre histoire culturelle des lumières.
Pourquoi l'Algérien n'ose pas dire à sa femme, à sa bien-aimée « je t'aime?».
En proie à cette aliénation culturelle spirituelle, troublé, égaré, l'Algérien considère que l'amour est un acte de faiblesse. Victime de la culture du féminicide et du racisme sexuel, l'Algérien voit en l'amour un manque de virilité (arroujoula).
Dans l'imaginaire de l'Algérien amputé de sa culture ancestrale libératrice, l'amour est contre la morale. L'amour est contre la religion. Cet état d'esprit embrouillé est le résultat d'une culture machiste importée qui refuse que la femme soit propriétaire de ses émotions et reine de son corps.
Chez nous, l'image de l'amour est souvent amalgamée à celle du sexe.
Cette confusion entre le corporel et le sentimental est due à l'absence de culture spirituelle religieuse et artistique. Le soufisme, tels les écrits d'Ibn Arabi, d'Al Hallaj, d'el Bastami, d'ibn Sab'ïn, a été pendant longtemps combattu par le fanatisme. La culture de la spiritualité est toujours chassée et dénigrée par les forces de l'islam politique.
Religieusement parlant, nous sommes pauvres de la culture spirituelle. Et l'amour dans sa dimension divine et temporelle est une partie de cette culture absente ou chassée de notre quotidien.
À travers l'Histoire de la civilisation islamique, nous avons eu des féqihs éclairés qui nous ont donné des oeuvres immortelles sur le thème de l'amour. Ils faisaient la concurrence savante et artistique aux poètes célèbres dans ce domaine à l'image d'Omar Ibn Abi Rabiâ, Abou Nouas, Ibn Zaydoun... Ils écrivaient avec un esprit libre, sans tabous et sans prohibition. Loin du duel hallal et haram!
Pour avoir une idée sur l'histoire des féqihs éclairés qui ont écrit sur l'amour, le corps et le désir, il faut lire, entre autres, les livres suivants: «Livre de la fleur» «Al-Zahra» d'Ibn Daoud (868-909), «Lamper l'écume de l'enchantement halal» (Rachf Ezzoulal mina essihri el halal) de Jalal Eddine Al-Suyuti (1445-1505) considéré comme le fékih de l'amour, «Le Jardin des amants et la flânerie des impatients» (Rawdhat el mouhibbine wa nouzhat el mouchtaqine) d'Ibn Qayyim Al-Jawziya (1292-1350), «Le livre des chansons» (Al-Aghani) d'Abu al-Faraj al-Isfahani (897-967), «La prairie parfumée» (Arrwdh el ateer) d'El Nafzaoui (1395-1433), «Les Mille et Une Nuits», «Le collier de la colombe sur l'amour et les amants» d'Ibn Hazm(994-1064)....
Afin de libérer le citoyen des idées fanatiques et suicidaires, il est urgent de libérer la lecture en s'ouvrant sur l'histoire des textes éclairés de nos féqihs audacieux.
Malgré ce grand héritage d'amour écrit par les ancêtres poètes et féqihs, pour nous dire que l'amour est le poumon de l'existence humaine, il est difficile pour un Algérien d'aujourd'hui de dire à son amante ou à sa femme « je t'aime».
Ce blocage sentimental individuel et collectif est le résultat d'une rupture violente avec notre histoire culturelle éclairée, libre et audacieuse.
Quand l'Algérien fait une déclaration d'amour à sa bien-aimée, il la fait dans un discours violent qui explique ce vide spirituel, culturel et langagier.
Face à cette ignorance de l'héritage nord-africain et humain porteur de l'histoire du sentimental, l'âme a été vidée de l'énergie de l'amour et prise en otage par une culture dogmatique sèche.
En ce temps de guerre, les sensations sont mortes ou refoulées.
En ce temps de haine, la lecture de la poésie a diminué.
En ce temps de violence, la présence des beaux-arts est éclipsée.
Plus nous nous éloignons de l'amour, dans toutes ses significations, plus nous nous rapprochons de l'abîme humain.
Quand l'amour décline, la sauvagerie humaine grandit en nous et autour de nous.
En ce temps de sang, les vrais philosophes ont disparu, les autres sont devenus des commentateurs des guerres et allumeurs des feux des haines et du racisme.
Nous n'avons plus de poètes d'amour fiers de leurs ancêtres.
Nous n'avons plus de cinéastes des films d'amour capables de faire verser des larmes chaudes aux spectateurs, assis dans l'obscurité et le silence des salles de projection.
Nous n'avons plus de romans qui racontent un récit d'amour à l'image de «Madame Bovary» de Flaubert, «Le Bossu de Notre-Dame» de Victor Hugo ou «Jamilia» d'Itmatov...
Plus il y a d'amour, plus l'hypocrisie se fait rare.
Chaque fois que la corruption prime, l'amour recule, celui de la patrie, de la femme et de l'identité.
Nos sages ancêtres disaient: «Les enfants nés d'une relation d'amour sont toujours beaux.». 

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