Les présidents Tebboune et El Ghazouani y ont lancé les travaux de deux projets stratégiques
L'Afrique passe par Tindouf
L'Algérie et la Mauritanie ont enclenché un nouveau processus d'intégration économique et sociale.
Le Maghreb a vécu, ce jeudi, une séquence historique. Depuis les indépendances de tous les pays de la région, c'est bien la première fois que deux chefs d'État se rencontrent à la frontière entre les deux pays pour inaugurer des projets stratégiques. Il y a eu des contacts par le passé, les premiers responsables des cinq pays de la région s'étaient promis beaucoup de choses. Mais, pour l'essentiel des engagements pris par l'un ou l'autre Président, l'on n'a jamais vu des initiatives concrètes qui engagent effectivement les gouvernements, impliquent directement les opérateurs économiques et bénéficient directement aux populations frontalières. Ce jeudi, les présidents Abdelmadhjid Tebboune et Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani ont mis la première pierre à des projets communs qui ont tous les attributs de l'historicité.
L'Algérie et la Mauritanie ont enclenché un nouveau processus d'intégration économique et sociale qui met les appareils de réalisation et de production, au service d'un développement inclusif de chacun des pays. Que les entreprises qui bâtissent la route liant Tindouf, en Algérie, à Zouerate, en Mauritanie, soient exclusivement algériennes a du sens. Plus qu'une symbolique, cette route met déjà en évidence les compétences de l'outil algérien, la maîtrise de l'ingénierie et l'ambition de réaliser en dehors des frontières. C'est une première nationale, mais c'est également le sens profond qu'entend donner le chef de l'État à l'acte historique d'inaugurer les travaux de la route et de la zone franche. Abdelmadjid Tebboune s'est exclusivement adressé aux opérateurs économiques algériens et mauritaniens. Cela revient à comprendre que ces infrastructures sont à la disposition des entreprises des deux pays. Ces dernières créeront de la richesse dans leurs pays respectifs, mais aussi et surtout, une dynamique commerciale qui, en plus de susciter une réelle dynamique des deux côtés de la frontière, agiront sur l'indice des prix sur beaucoup de produits. En consommant mauritanien, les Algériens payeront moins cher. Le contraire est bien entendu valable. Les produits de la mer, tout ce qui est agroalimentaire et même certaines matières premières peuvent constituer un trop-plein efficace pour améliorer le volume des échanges commerciaux, à la grande satisfaction des consommateurs des deux pays. Au-delà de l'immédiateté des bénéfices qu'en tirent les économies algérienne et mauritanienne, ces échanges bétonneront les relations et sécuriseront une large bande de la frontière. Cette fonction des infrastructures réalisées entre deux pays constitue une donne stratégique majeure. Autant l'économie améliore les conditions de vie des populations frontières, autant elle consolide la sécurité et réduit les trafics aux frontières. Il n'est pas dit qu'elle soit la panacée à tous les problèmes de développement, mais il est certain que stabiliser une frontière est la principale mission d'un État. En cela la vision de l'Algérie dépasse le cadre mauritanien, puisque le même modèle est prévu avec l'ensemble des pays voisins. Les projets des zones franches avec la Libye, le Niger et le Mali ne relèvent plus du voeu pieux, bien au contraire. La stabilisation des frontières est une première étape qui sera suivie par un partenariat plus conséquent avec les pays de l'Afrique de l'Ouest. Le travail a déjà débuté avec l'implantation de banques algériennes dans cette partie du continent. Et plus encore la réalisation du gazoduc transsaharien liant l'Algérie au Nigeria, la dorsale de fibre optique et la route de l'unité africaine qui suit le même tracé sont autant de preuves de l'ambition de l'Algérie d'élargir considérablement le cercle de l'intégration économique de l'Afrique. Maître d'oeuvre de ce vaste plan géoéconomique et géopolitique, le président Tebboune en a lancé, avant-hier, une partie qui intervient en appui à la consécration d'un milliard de dollars aux projets de développement de proximité dans toute l'Afrique. Cela pour dire que la cérémonie algéro-mauritanienne rehaussée par les Présidents des deux pays n'est, en rien, un acte isolé. C'est une pièce de l'immense puzzle politico-économique que construit l'Algérie pour soustraire l'Afrique aux ingérences étrangères. Il est néanmoins évident que le projet est de longue haleine. Mais le sens de la vision algérienne est on ne peut plus clair et renvoie au compter sur soi. L'Algérie veut s'ouvrir les portes de l'Afrique et Tindouf est la première.