«Israël cherche le chaos au Moyen-Orient»

L'Expression:Quelle est l'origine de l'escalade entre l'Iran et l'entité sioniste, qui justifie l'attaque massive avec l'usage de drones et de missiles?
Dr.Arslan Chikhaoui;Le conflit, larvé depuis un certain nombre d'années entre l'Iran et l'entité sioniste, s'est transformé en conflit de moyenne intensité depuis deux semaines. La principale raison tient dans la provocation volontaire d'Israël à travers la frappe visant le consulat iranien à Damas, le 1er avril 2024. Cette attaque, qui est à l'origine de l'escalade, avait provoqué la mort de sept Gardiens de la révolution iranienne dont le général Mohammad Reza Zahedi, commandant de la force Al-Qods iranienne pour la Syrie et le Liban. En réaction, le guide suprême iranien, l'Ayatollah Ali Khameneï avait promis de «punir» Israël, dans un contexte régional explosif de la guerre à Gaza.

Cette frappe israélienne a déjà beaucoup d'antécédents. Serait-elle la goutte qui a fait déborder le vase?
Cette approche est très proche de la réalité du terrain. On en veut pour preuve que les tensions entre les deux belligérants connaissent une progression exponentielle dans l'espace et le temps. En Syrie, l'entité sioniste mène une campagne militaire active que ses stratèges appellent «la guerre entre les guerres», ciblant les livraisons d'armes iraniennes, dont certaines sont destinées au Liban et le personnel lié à l'Iran. La frappe de Damas était la dernière d'une série d'opérations menées depuis fin 2023 contre des membres des Gardiens de la révolution et de sa force Al-Qods. Israël a également mené des actions secrètes répétées pour nuire au programme nucléaire iranien, à ses installations militaires et à ses infrastructures énergétiques. L'armée sioniste a même échangé des attaques avec l'Iran en haute mer et dans le cyberespace. L'Iran, quant à lui a affirmé clairement son hostilité à l'égard d'Israël et de ses exactions à l'encontre du peuple palestinien et qui constitue un principe révolutionnaire fondamental. En conséquence, l'Iran est accusé par l'Occident global de soutenir sous différentes formes le Hamas palestinien, les Houthis du Yémen, le Hezbollah au Liban et la Résistance en Irak et en Syrie. C'est vous dire que l'on est effectivement dans une longue séquence d'agression qui va crescendo, jusqu'à obliger Téhéran à répondre pour affirmer sa détermination à ne pas se laisser dominer par son ennemi.

La frappe israélienne et la réplique iranienne interviennent dans un contexte de guerre génocidaire menée par l'entité sioniste contre la population de Ghaza. En quoi selon vous, actualité guerrière peut-elle peser dans le conflit latent entre Téhéran et Tel Aviv?
Dans le contexte actuel du conflit asymétrique à Ghaza, qui en est à son septième mois, la politique de la corde raide entre ces deux belligérants menace de transformer la «guerre entre les guerres» en une confrontation directe. Les dirigeants iraniens ont généralement cherché à maintenir ce que les responsables iraniens appellent «la patience stratégique» en réponse aux attaques passées, en contrecarrant le sabotage nucléaire par une expansion nucléaire redoublée et des frappes contre ses hauts commandants, avec un engagement plus profond à renforcer les capacités de ses alliés non étatiques dans la région. Certains observateurs avertis à Téhéran mettent en garde contre le piège de l'escalade, dans lequel une attaque en représailles à la frappe du consulat pourrait voir la République Islamique affronter non seulement l'entité sioniste d'Israël, mais aussi les États-Unis d'Amérique qui le défendent sans aucune équivoque. Par contre, d'autres observateurs affirment que les adversaires de l'Iran interpréteront l'incapacité à répondre à cette dernière d'une longue série d'opérations ciblées comme une faiblesse, provoquant ainsi de nouvelles attaques israéliennes encore plus importantes. Cette vision crédite la thèse selon laquelle Israël cherche à imposer un chaos généralisé au Moyen-Orient.

La réaction iranienne ouvre-t-elle une nouvelle séquence dans le conflit?
Les conséquences de cette attaque directe aux drones et aux missiles balistiques iraniens pourraient être profondes. Elles susciteront très vraisemblablement une escalade de la réponse sous la forme de représailles israéliennes. Il est également peu probable que Washington reste les bras croisés, quels que soient ses désaccords affichés avec Israël au sujet de Ghaza. Il se pourrait même que ça soit le prétexte pour que Washinton mette en place des mesures conservatoires additionnelles contre l'Iran.
En d'autres termes, l'action iranienne, même si elle est conçue à Téhéran comme étant calibrée et limitée dans sa portée, pourrait rapidement déclencher une confrontation plus large impliquant les alliés respectifs de chaque camp avec des secousses politiques, diplomatiques et économiques. La vitesse de reconfiguration de la cartographie géopolitique de la planète va incontestablement passer à un autre palier.