Trafic de drogue
Quand le Maroc inonde l’Espagne
284 kg de drogue en provenance du Maroc ont été interceptés dans le port d’Algésiras.

La culture du cannabis, le Maroc en est accroc. Elle fait vivre la population montagnarde et pauvre du Rif, une région traditionnellement rebelle au trône, toujours en ébullition depuis qu’un jeune poissonnier, Mouhcine Fikri, est décédé le 28 octobre 2016 broyé par une benne à ordures. Cette activité assure de surcroît des revenus à 800 000 Marocains et représente surtout près du 1/4 du Produit intérieur brut du royaume. Ce business dont le Maroc tire ses principales ressources nous plonge dans l’univers glauque du trafic de drogue. Et cette fois-ci, c’est l’Espagne, terrain de prédilection des dealers marocains, qui en est le théâtre. 284 kg de haschisch dissimulés dans un camion de marchandises en provenance du Maroc ont été interceptés dans le Port d’Algésiras (à l’entrée du détroit de Gibraltar par où transitent 1 million de véhicules entre le Maroc et l’Espagne) par la Police nationale espagnole, lors d’une nouvelle opération dans le cadre du Plan spécial de sécurité contre le trafic de drogues. Un scénario digne d’un feuilleton policier. L’opération est décrite avec minutie. Que dit-elle ? Une fois localisé à la frontière portuaire, les agents de la Police nationale, en collaboration avec l’unité canine de guidage, ont procédé à une inspection minutieuse du véhicule, mentionne le rapport de la police espagnole. Les chiens, spécialisés dans la détection de drogues, ont indiqué la présence possible d’une substance stupéfiante dans le camion, ce qui a donné lieu à une inspection technique détaillée. C’est alors qu’un compartiment parfaitement étanche, dissimulé dans la paroi de la remorque, a été découvert, souligne le document. C’est ainsi que le pot aux roses a été dévoilé. Les enquêteurs ont pu mettre la main sur plusieurs paquets de haschisch répartis à l’intérieur de la structure du camion, dont le poids avoisinait les 300 kg. Cette affaire vient s’ajouter à d’autres. La police espagnole a réussi à démanteler une bande criminelle spécialisée dans le trafic de drogue à partir du Maroc, en arrêtant 6 criminels, en plus de 7 autres interpellés en mai dernier, a indiqué le journal espagnol El Faro de Ceuta. «Ces arrestations ont eu lieu le 21 janvier à Alicante, où 5 hommes et 1 femme ont été arrêtés dans le cadre de l’enquête relative à l’affaire du déchargement des 4 tonnes de drogues dans une baie (non loin) du port Olivet à l’Ametlla de Mar en mai 2024», précise le quotidien. «Près de 3 tonnes de cocaïne et 4 armes de guerre ont été saisies sur un groupe de trafiquants de drogue traversant clandestinement le Guadalquivir», a révélé en ce début d’année le site espagnol d’information elfarodeceuta.es. En mars 2024, le journal espagnol El Espanol avait fait état d’un scandale autour d’un trafic de drogue entre la Péninsule ibérique et le Maroc impliquant la Marine royale marocaine. Il faut savoir que ce créneau juteux rapporte entre 4,3 et 6,3 milliards de dollars à l’économie marocaine. S’il avait pour objectif d’acheter la paix sociale dans le Rif, région traditionnellement frondeuse, opposée au trône alaouite, derrière ce «trafic» se cachent des bandes criminelles organisées.
Ces dernières sont à l’origine de réseaux de corruption et de clientélisme qui ont gangrené jusqu’aux plus hauts niveaux des autorités de l’État. Gendarmes militaires, hommes politiques... ont été, et sont, encore impliqués. Le PJD, ex-parti au pouvoir de l’ex-chef du gouvernement marocain, Abdelilah Benkirane, qui a fait de la moralisation de la vie publique son cheval de bataille, a été éclaboussé. Le tribunal de Casablanca avait condamné un cadre local du Parti de la justice et du développement (PJD), le parti islamiste au pouvoir au Maroc, à 6 ans de prison ferme pour sa participation à un réseau international de trafic de drogue, avait rapporté, en 2013, la presse marocaine. Au mois de janvier 2009, 96 personnes, bon nombre d’entre elles appartenant aux Forces armées royales marocaines, ont été mises en examen, suite au démantèlement d’un important réseau de trafic de drogue entre le Maroc, la Belgique et les Pays-Bas via l’Espagne. Un commandant, 9 gradés et 1 gendarme se sont retrouvés au milieu de réseaux de narcotrafic et de filières de migration clandestine au mois d’avril 2012... La liste est longue. Elle confirme que le Makhzen est un nid de narcotrafiquants.