Face à la perspective du nouvel ordre mondial
Tebboune et Ramaphosa préparent le continent
L’apport du tandem algéro-sud-africain ne sera pas seulement politique. Alger et Pretoria agiront sur le terrain économique.
Les évolutions géopolitiques majeures qui annoncent la perspective d'un nouvel ordre mondial multipolaire, l'influence grandissante en Afrique de nouvelles puissances, à l'image de la Chine et la Russie donnent au renforcement du partenariat algéro-sud-africain une dimension nouvelle. Cette relation particulière et également d'une solidité à toute épreuve s'imbrique parfaitement dans la dynamique de prise de conscience africaine de la nécessaire réappropriation de la souveraineté des États. Cette tendance parfaitement observée dans les pays du Sahel et en Afrique centrale relève d'un nouveau processus historique qui sera certainement long et complexe, en raison notamment de la fragilité des États qui aspirent à leurs indépendances. L'Algérie et l'Afrique du Sud, dont les voix sont écoutées à l'Union africaine, auront certainement un rôle essentiel à jouer au plan politico-diplomatique. Il devient, en effet, évident que cette nouvelle vague de «libération» ne sera pas un long fleuve tranquille. Les forces impérialistes défendront leurs prés carrés en usant des moyens les plus vils. Et ce ne sont pas les mercenaires qui manquent pour mettre en oeuvre des plans de déstabilisation de régions entières du continent. L'apport du tandem algéro-sud-africain ne sera pas seulement politique. Les moyens économiques et financiers dont les deux pays disposent devront aider à la guerre d'influence que les Africains auront à mener contre un Occident prédateur. Il ne s'agit pas d'interdire la terre d'Afrique à toutes les multinationales occidentales, mais de faire évoluer les règles du jeu pour que les populations autochtones puissent profiter des richesses de leurs pays. Il est certain que l'entreprise est gigantesque à la hauteur de la grande épopée des décolonisations des années 60. Et cette nouvelle «révolte africaine» sera celle de l'autonomie économique, donc de l'émergence du continent. Ce qui ajoute à la complexité de l'entreprise et à la détermination de l'Occident à ne pas perdre cette guerre. Mais l'Afrique est désormais beaucoup mieux armée qu'à l'époque des colonisations. Elle a noué des relations solides et diversifié ses partenariats. Les enjeux stratégiques, qui font de l'Afrique la prochaine destination de la croissance économique mondiale et terrain de la bataille entre les pôles de puissance du moment, peuvent donner l'impression d'être au-dessus des compétences de deux nations africaines. Cette pensée serait catastrophique pour les Africains puisqu'elle signifie une «sortie» de l'Histoire. Avec ses champions, dont on peut ajouter en plus de l'Algérie et l'Afrique du Sud, l'Éthiopie, le Nigeria et l'Égypte, le continent doit absolument compter dans le nouveau processus qui s'enclenche. L'Afrique doit avoir une place de choix dans le cadre du nouvel ordre mondial multipolaire. Son milliard et demi d'habitants, avec une moyenne d'âge assez basse, ses richesses naturelles, ses entreprises, ses élites et sa diaspora constituent autant d'arguments d'émergence. Mais afin que cela se réalise, il est important pour les États africains d'affirmer leurs souverainetés, mais également leur unité et une solidarité véritable. L'axe Alger-Pretoria n'est certainement pas le seul levier de l'émergence, mais il constitue, à n'en pas douter un bel exemple à suivre. D'autres initiatives naîtront aux quatre coins du continent. L'essentiel est de faire de l'Afrique une terre de croissance pour les Africains d'abord.