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Lyna Khoudri, actrice franco-algérienne, à L'Expression

«Il faut croire en soi pour y arriver»

Elle est actuellement à l'affiche de Nos Frangins de Rachid Bouchareb, sorti en France et hier en Algérie. Lyna Khoudri est une actrice franco-algérienne, née à Alger le 3 octobre 1992. Prix Orizzonti» de la meilleure actrice à la Mostra de Venise en 2017, dans Les Bienheureux de Sofia Djama, elle est révélée par son rôle de papicha dans le film du même nom, réalisé par la franco-algérienne Mounia Meddour en 2019.
Ce rôle lui ouvre les portes du cinéma français. Les critiques sont très positives et elle décroche le convoité César du meilleur espoir féminin pour son interprétation. Elle retrouvera la réalisatrice dans un second film dramatique: Houria dont la sortie en France est prévue en 2023. Elle apparaît ensuite dans plusieurs superproductions comme Novembre de Cédric Jimenez, The French Dispatch de Wes Anderson ou encore le diptyque Les Trois Mousquetaires mis en scène par le cinéaste Martin Bourboulon. Rappelons que Lyna Khoudri est née à Alger, d'un père journaliste à la télévision algérienne
(Rabah Khoudri) et d'une mère artiste, professeure de violon. La famille quitte l'Algérie pour Aubervilliers à la suite de la décennie noire. Aujourd'hui, Lyna est une comédienne «bancable». Pourtant, cela n'a pas toujours été le cas..Confidence ici de la jeune femme de 30 ans qui allie à la fois, charme, talent et modestie.....

L'Expression: Ça fait quoi de revenir dans votre pays d'origine pour une avant-première?
Lyna Khoudri: Je n'ai jamais coupé les liens. Je suis revenue très régulièrement. Je suis toujours contente et pour présenter un film, je suis contente et fière de pouvoir partager cela avec le public algérien.

L'Expression: Aujourdhui, vous êtes à l'affiche de Nos Frangins, long métrage de Rachid Bouchareb. Ça fait quoi d'incarner la soeur d'une victime des exactions policières de l'époque et qui plus est a vraiment existé,
Oui, c'est fort et ça demande beaucoup de concentration et de précision pour essayer d'être fidele et ne pas trahir la réalité et en même temps, c'est un travail intéressant. On a essayé de retrouver le look de Sarah à l'époque. On avait quelques images d'elle. On a essayé donc de s'en rapprocher. Apres, il y a eu un vrai travail de documentation. Beaucoup d'archives de la part de Rachid Bouchareb. Il a fait tout un travail de recherche qu'il a partagé avec nous. C'était autant intéressant sur le plan historique/documentation et recherche que sur le plan de l'acting et du jeu, etc.

L'Expression: Est-ce que ce n'est pas trop difficile pour vous d'incarner une Algérienne de la décennie noire par rapport aux autres rôles? De porter une telle histoire sur vos épaules au cinéma comme dans Papicha ou Houriya par exemple?
Oui, mais je le porte pas forcément dans mes films à part dans «Papicha». Je n'ai pas l'impression de porter sur les épaules un passé particulier. J'aborde des personnages de la même manière à chaque fois, c'est-à-dire en essayant de les comprendre, de savoir d'où ils viennent, pourquoi ils en sont là, c'est quoi leur choix? Qu'est-ce qui les anime etc. Ce n'est pas plus difficile. Au contraire, c'est facile parce que mon histoire, c'est l'histoire de mes parents. Je connais l'histoire, on m'a beaucoup raconté. J'ai la chance d'avoir des parents qui m'ont beaucoup parlé, beaucoup expliqué les choses. C'est une richesse. Il y a plein de pans de l'Algérie qui m'ont servie, par exemple dans Papicha, qu'on n'a pas eu à m'expliquer. Sarah Oussekine n'a rien n y avoir avec ça. Si ce n'est ses origines. Mon histoire n'a rien a voir, à part ressentir l'injustice que je peux comprendre, car je suis d'origine algérienne et il y a énormément de discrimination et d'injustice à ce niveau, en France, cela m'aide. Je dirai de plus que mon histoire et ma vraie vie m'aident à comprendre les problématiques de mes personnages.

L'Expression: Comment s'est passé le travail avec Rachid Bouchareb dans Nos frangins ?
On s'est très bien entendus tout de suite et après on s'est mis au travail. il m'a beaucoup partagé ses documents, ses archives, il m'a beaucoup raconté comment il a vécu ça en 1986, son point de vue, politiquement, ce qui s'était passé, comment ça avait été accueilli toutes les actions politiques qui avaient été faites à l'époque. C'est un directeur d'acteur très simple, très calme, sans être brusque il arrive à t'amener à un endroit et en même temps, il est très ouvert à ce que tu lui propose. Il est beaucoup dans le partage. Il est très à l'écoute. Il est d'une grande intelligence et les gens intelligents sont les plus ouverts, ont une aura très grande et Rachid a ça. Il est prêt à recevoir.

L'Expression: Du Prix de la meilleure interprétation féminine à la Mostra féminine en 2017 à aujourd'hui, vous avez enchaîné les rôles très rapidement et avec de grands réalisateurs. Comment l'expliquez vous... il y a du talent bien sûr...
(Rire, je ne vais pas dire ça). Il y a eu de la chance aussi. Il y a beaucoup d'années de travail avant qui ne sont pas visibles que vous ne connaissez pas. Les gens de mon entourage savent à quel point ca été galère et à quel point il a fallu se battre et auquel point cela n'a pas été facile. C'est comme récolter ce qu'on a semé, même si je m'en rends bien compte qu'il ne s'agit pas que du travail, que de talent mais de chance un peu aussi, de destin, de rencontrer les bonnes personnes. J'ai eu la chance de rencontrer Mounia Meddour et ca été un vrai tournant dans ma vie, puis de rencontrer Rachid Bouchareb, Wes Anderson... ce que la vie a prévu pour toi...Et cela est incroyable. Quand je passe un casting je ne suis pas sûr de l'avoir. On a beau travailler dix ans, ce n'est pas sûr de ce qui arrive. Je pense qu'il faut avoir beaucoup d'espoir et croire en soi, avoir la foi en soi et de ce qu'on veut faire. Moi je sais que c'était ça ou rien. En quelque sorte, l'énergie que j'ai mis a été peut être différente. j'ai jamais imaginé un plan B. Tout à l'heure, il y a un jeune homme qui me disait, je veux être comédien, mais entre-temps je fais de la com.J'ai dit que tu ne peux pas me dire ça, je veux être comédien si tu me dis je fais de la com. Pour moi, c'est incompatible. Si on veut être comédien, on va être comédien à tout prix. C'est un métier de passion et de sacrifice très dur. Il n' y a pas beaucoup de places, beaucoup de rôles. Il faut le vouloir vraiment. Après je comprends, il ya des obligations bien sûr...moi, j'ai beaucoup attendu. Finalement ce n'était pas de la galère que j'ai connu. C'était plutôt des années très instructives, intéressantes et fondatrices aussi. Ces années là parfois, elles me manquent. Ce sont des années où j'apprenais beaucoup, où j'allais à l'école, je rencontrais des professeurs de théâtre qui me transmettaient des choses. Là, je suis en manque de ça aussi. En tant qu'acteur on donne, on reçoit. Quand on est à l'école, on ne doit rien à personne, je m'expérimente, je peux me tromper, il n' y a pas de problèmes. Des fois, ca me manque. Ce ne sont pas des années de galère finalement. C'était de belles années.

L'Expression: Ces années-là vous ont forgé pour ce que vous êtes aujourd'hui...
Oui. Evidemment c'est dur quand on a des refus à répétition. J'ai dû passer une foule de castings avant d'avoir un rôle principal au cinéma. Avant Papicha, il y eut des tonnes de casting et une bonne centaine de mails envoyés. des mails où on ne te répond jamais. Il ne faut jamais perdre espoir. Il y a cette image qui m'a suivie beaucoup, c'était deux petits bonhommes sous un tunnel qu,ils creusaient. Au bout du tunnel, il y avait un trésor. Il y en a un qui arrive à dix millimètres du tunnel et qui renonce et il y a celui qui continue et tu vois tout le parcours et tu comprends qu'il en a marre au bout d'un moment, mais en fait, il est resté. Il restait pour l'autre, peut- être un dernier coup de pioche, avant d' y accéder et il n'a pas eu le courage de faire ce dernier coup de pioche et il a renoncé. Ça, ça m'a beaucoup parlé. Je me suis dit qu'il ne faut jamais s'arrêter parce qu'on ne sait pas. Si ça se trouve, il te manquait un pas et pour ça, il faut avoir énormément d'espoir et pour avoir énormément d'espoir, il faut croire en soi et ce n'est pas facile de croire en soi quand personne ne veut de toi ou quand on te tend pas la main, mais il faut être attentif aux signes. Après, moi je suis croyante, c'est un plus. Je suis très attentive à ce qui m'entoure et des fois, un petit truc, je l'interprétais comme un pas immense. Si on me dit, on a besoin d'aide à la régie, sur un court métrage par exemple et bien j' y allais et je trouvais cela déjà extraordinaire. Si on me disait, il y a tel cours là-bas, à deux heures de Paris, il faut y aller, tu verras c'est génial! bin, j y allais, même si c'était galère en soi. Chaque petit pas que je faisais je trouvais que c'était un grand pas.

L'Expression: Vos avez déclaré que vous vouliez rendre hommage à votre père puis à votre mère au cinéma...
On me demande souvent «quelle est l'héroïne que vous aimeriez incarner»? Je pense souvent à ma mère. Parce qu'on parle souvent de mon père car il a toujours été sur le devant de la scène et en fait, ma mère est d'autant plus si ce n'est plus forte que lui (désolé papa! Rire) mais il faut dire la vérité. Apres, je suis très fière d'être sa fille et fière de qui il est. Il a fait un métier d'image. Évidemment c'est lui qui est connu etc. Ma mère était dans l'ombre, mais c'est une grande dame. Ca m'intéresse de savoir comment elle, elle a vécu tout ça. Parce que le point de vue de mon père, je le connais et publiquement en Algérie on le connaît.

L'Expression: Quels sont les comédiens ou les gens du cinéma qui vous inspirent?
Il y a beaucoup d'actrices et d'acteurs. Isabelle Adjani comme j'ai tendance à le dire souvent. Gina Roland, Al Pacino, Dustin Hoffman. Des acteurs étonnants!

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