La Jordanie présente au Festival de Cannes
Parmi les films arabes présents sur la Croisette, on retiendra le film jordanien Inchallah un fils du cinéaste jordanien Amjad Al Rasheed. Le premier film jordanien a été sélectionné en compétition. Ce dernier a été accueilli par une salve d'applaudissements après la projection de son premier long-métrage. Tourné dans la ville d'Amman et bénéficiant du soutien de la Commission royale du film de Jordanie, ce film ne laisse personne indifférent. Âgé de 38 ans et faisant son entrée fracassante dans l'univers du cinéma avec une sélection à la Semaine de la Critique, Al Rasheed s'attaque audacieusement à l'injustice flagrante infligée à son personnage principal, Nawal, incarnée par Mona Hawa. À la suite de la mort abrupte de son mari, elle se trouve dépossédée de son héritage conformément aux lois de succession locales, puisque ses biens reviennent aux parents les plus proches du défunt, son unique héritière étant une fille. Le réalisateur nous plonge alors dans un monde de duplicité, où le beau-frère bien intentionné se transforme en une figure oppressive, réclamant ce qu'il considère comme sa part d'héritage et allant même jusqu'à menacer de retirer la garde de sa nièce à Nawal. La protagoniste se voit également trahie par son propre frère, qui préfère rester silencieux pour éviter tout scandale. Désespérée, Nawal feint une grossesse dans l'espoir d'acheter du temps. Al Rasheed révèle qu'une situation étonnamment similaire a touché une personne de son entourage. Le destin des femmes, souvent dépossédées de leur libre arbitre et victimes de violations de leurs droits, est un sujet qui reste douloureusement pertinent dans le Monde arabe. Rompu aux clichés, Al Rasheed tient à préciser que les femmes qui ont inspiré son oeuvre sont loin d'être des victimes silencieuses. «Ce sont des femmes fortes, prêtes à se battre», affirme-t-il, soulignant néanmoins leur lutte constante pour se faire entendre dans une société majoritairement masculine. Le réalisateur dépeint aussi l'intransigeance du conservatisme sociétal qui stigmatise rapidement les femmes pour leur «mauvaise conduite», si elles sont aperçues en compagnie d'un homme hors de leur cercle familial ou rentrent tardivement à la maison. Enthousiasmé par l'opportunité de représenter la Jordanie à Cannes, le cinéaste attend avec impatience la réaction de son public national à cette audacieuse oeuvre. «Le cinéma jordanien est encore en pleine maturation et notre peuple est très sensible. C'est une société qui n'est pas habituée à se voir dépeinte à l'écran», explique-t-il. Quant à la montée du cinéma arabe, Al Rasheed souligne la puissance des histoires quotidiennes qui méritent d'être partagées. Il avertit, toutefois, contre l'auto-complaisance. Un avertissement sonore pour une industrie du cinéma en pleine effervescence et une société à la croisée des chemins.