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Vivre ensemble dites-vous?

«Tout bien considéré, cette logique géométrique, parce qu'elle se veut logique, va jusqu'à confisquer aux acteurs la possibilité de contester le modèle du vivre ensemble qui leur est imposé. Somme toute, et pour cause, la question du vivre ensemble devient particulièrement normative, attendu que chacun a une place, chacun se trouve aussi devant un ordre des possibles et des impossibles pour sa vie, c'est-à-dire pour sa place dans la société.» Sidi Mohammed El-Ghaouti BESSENOUCI

Je veux bien et tout de suite, serais-je tenté de renchérir pour mieux décliner ma bonne foi légendaire! Mais où et comment, c'est le questionnement qui vient subrepticement à l'esprit d'un quidam qui a tant donné, mû qu'il est par une conception altruiste du bonheur, sans pour autant recevoir en retour. Chacun y va du sien et les définitions sont multiples. La bonne foi y est omniprésente alors que d'aucuns ignorent royalement ce que «Vivre ensemble» veut dire. L'explication cohérente et objective, je la dois à mon ami Sidi Mohammed El-Ghaouti Bessenouci pour qui ce néologisme, mis à toutes les sauces, pose inévitablement la question des règles du jeu social et de la bonne conduite dans un monde qui insensiblement voit se défaire devant nos yeux les ensembles à la fois politiques et territoriaux, sociaux et culturels que nous appelions jadis des sociétés, des civilisations ou simplement des pays. Comment serait-il possible alors de vivre ensemble? L'universitaire tlemcénien n'hésitera pas à faire référence au sociologue français Alain Touraine pour qui la réponse à cette nébuleuse question consisterait à «développer en chacun la capacité de s'assumer comme acteur de sa propre histoire, de développer un projet de vie personnel et du même coup participer à un mouvement social». A partir de là, sa conception de la vie sociale préfigure deux temps intelligibles: celui de la transformation de l'individu en Sujet-acteur, ce qui n'est possible qu'à travers la reconnaissance de l'Autre; celui de la transformation des institutions. En termes décodés, nous apprend la même source, «nous ne pourrons vivre ensemble, c'est-à-dire combiner l'unité d'une société avec la diversité des personnalités et des cultures qu'en plaçant l'idée de Sujet personnel au centre de notre réflexion et de notre action». En cela me confie l'universitaire tlemcénien, «il faut dire cependant que cette image d'un vivre ensemble comme «logique géométrique» - où chaque fraction de la société a une part et une part de responsabilité - remonte à l'Antiquité. Jacques Rancière (un philosophe algérois élève de Louis Althusser, lui-même algérois et qui avait animé dans les années 1970 le collectif Révoltes Logiques qui, sous les auspices de la pensée de Rimbaud, remettait en cause les représentations du social traditionnelles), montre très bien que tant Platon qu'Aristote conçoivent le vivre ensemble comme une distribution des biens de la communauté (richesse, honneur, droit, devoir). Chacun y a sa part, plus ou moins grande, mais la réussite du vivre ensemble dépend de la capacité de chacun à ne pas sortir ni revendiquer plus que sa part». C'est de façon délibérée que Sidi Mohammed El-Ghaouti Bessenouci reprend ce substantif de «logique», cette perspective dialectique du vivre ensemble, car elle pourrait conduire simplement à une représentation scientifique de la société: «Cette logique géométrique est d'autant plus malaisée à confirmer qu'elle survient de la philosophie puisqu'elle contraint tout un chacun à intérioriser - via la raison et jusqu'à en faire siennes - des opinions, des règles jusque-là étrangères. Tout bien considéré, cette logique géométrique, parce qu'elle se veut logique, va jusqu'à confisquer aux acteurs la possibilité de contester le modèle du vivre ensemble qui leur est imposé. Somme toute, et pour cause, la question du vivre ensemble devient particulièrement normative, attendu que chacun a une place, chacun se trouve aussi devant un ordre des possibles et des impossibles pour sa vie, c'est-à-dire pour sa place dans la société.» A l'évidence, cette façon de raisonner n'est pas sans rappeler l'analyse de Michel Foucault surtout que l'ensemble de l'oeuvre du philosophe français, largement inspirée par Nietzsche et Kant, est une critique des normes sociales et des mécanismes de pouvoir qui s'exercent au travers d'institutions en apparence neutres (la médecine, la justice, les rapports familiaux ou sexuels...) et pose des problématiques, à partir de l'étude d'identités individuelles et collectives en mouvement, des processus toujours reconduits de «subjectivation» (libération et création de soi).

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