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Sidi Rached, une sentinelle invisible

«Puis, délicatement, l'Islam vint se poser sur les gorges du Rhummel telle une pétale de rose pour s'ériger enfin en couronne de lumière surplombant la ville du Rocher qui, vue du ciel, ressemble à un burnous déployé sur ses nombreux pics éclaireurs.»

Je ne sais pas ce qui se passe avec le ministère de la Culture mais il me fait rater bien d'événements sur des sujets qui me tiennent particulièrement à coeur. Et pour lesquels j'ai surtout lutté à des moments où certains de leurs promoteurs actuels n'en connaissaient même pas l'essence. A fortiori lorsqu'il s'agit de soufisme où rares étaient ceux qui en parlaient.
Il aura fallu attendre la restauration dans ses droits historiques de l'Illumination sublime par le président Abdelaziz Bouteflika pour que des quidams de tous bords s'y investissent non sans avoir, au préalable, écarté tous ceux qui avaient soutenu, dans les moments difficiles, cette somptueuse quête de la connaissance et de la perfection. Comme nous ne sommes pas à une confiscation près, faut-il rappeler à ces fossoyeurs de la culture et de la personnalité nationales que l'absence physique à tel événement ne signifie nullement un éloignement, encore moins un détachement de ce qui constitue la raison d'être d'un citoyen digne de ce nom. Celui qui emprunte, tout comme moi, la voie de l'Illumination sublime, puise sa force dans la fusion qui, tout en le rendant invisible, lui permet à la faveur d'une extase, un sentiment océanique d'identité avec tout ce qui existe, de se retrouver là où il est en droit d'être. C'est grâce à cette attitude guidée par la justesse des positions et le sens de l'équité qu'il me semble avoir participé au colloque qui permit, en ce début de semaine, à l'antique Cirta de se mettre ou de se remettre, c'est selon, «à l'heure du soufisme, expression souveraine d'une spiritualité universelle porteuse de valeurs de paix, de solidarité et de compassion tel un ultime Testament proclamé par le Saint Coran».
Aux antipodes des pratiques systémiques négationnistes, malheureusement encore d'actualité, de la mémoire ankylosée et des faux barrages (je pensais que cette ère était révolue à jamais), l'affirmation des promoteurs scientifiques de cette manifestation invite au rêve et à la méditation: «Puis, délicatement, l'Islam vint se poser sur les gorges du Rhummel telle une pétale de rose pour s'ériger enfin en couronne de lumière surplombant la ville du Rocher qui, vue du ciel, ressemble à un burnous déployé sur ses nombreux pics éclaireurs. Ultime parure divine d'une richissime et complexe stratigraphie de rites et de croyances adoptés, au fil du temps, par cette cité tant africaine que méditerranéenne.»
Voulue comme carrefour des Voies d'Allah qui, d'est en ouest et de l'ouest à l'est, ont su se croiser, s'entregreffer et s'enrichir mutuellement, Constantine s'est saisie de la merveilleuse opportunité offerte par son nouveau statut de «Capitale de la culture arabe» pour proposer à ses citoyens et visiteurs un voyage initiatique à travers deux confréries-phares qui y élurent domicile: la Aïssawiyya venue de l'Occident musulman et la Khalwatiyya venue d'Orient, plus connue présentement sous le nom de Rahmâniyya.
C'est aussi à un hommage au saint patron de la ville que cette édition a été consacrée: «A Sidi Rached ce saint caché, méconnu de tous, y compris de ses propres enfants en dépit des récits contradictoires rapportés à son sujet! Pourtant, tel un soldat 'inconnu'' mais, ô combien fidèle à sa mission secrète, il continue de monter la garde, semblable à une sentinelle invisible, en dépit des vents qui soufflent sur le Rocher, parfois avec insolence, comme pour tenter, en vain, de le déstabiliser ou de remettre en cause son statut immuable.»
L'anthropologue Zaïm Khenchelaoui a tenu à rassurer plus d'un: «La thématique retenue n'a pas pour vocation d'écarter les autres expressions cultuelles lesquelles sont intimement liées à l'identité spirituelle de cette cité mystique quand bien même celles-ci demeureraient en marge de la pratique dite abusivement orthodoxe.»
En termes décodés, le coordinateur scientifique du colloque a tenu à rassurer. Les systèmes rituels autocéphales à l'image des «gnawa», des «fqîrât» et autres sont des composantes essentielles du paysage local: «Ils participent, à coup sûr, de son patrimoine immatériel et constituent la sève vivante de sa conscience profonde. C'est donc à tous ces aspects liés à la spiritualité constantinoise tant savante que populaire, à sa musique sacrée (malouf, qarqabou, aïssaoua, etc.), à la procession de son saint patron (kherdjat sidi Rached) ainsi qu'aux autres confréries soufies présentes sur son sol: les Hansala, les Taybî, etc., qu'a été dédiée la XIe édition des Routes de la Foi.»
Pour le Centre national de recherches préhistoriques, anthropologiques et historiques, ce rendez-vous scientifique marque un rebondissement significatif dans le domaine du savoir, de la réflexion et de la recherche académique en rapport avec le soufisme en tant que phénomène social global: «C'est à l'occasion de la proclamation de Constantine, Capitale de la culture arabe, que se tient notre colloque qui tend à rétablir à la Cité de Dieu - mais aussi des hommes - son identité mystique, la concilier avec sa vocation citoyenne et la consacrer enfin à sa mission éternelle et universelle.»

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