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MOHAMED AMINE HADJ SAÏD, SECRÉTAIRE D'ETAT CHARGÉ DU TOURISME À L'EXPRESSION

"La promotion touristique fait défaut"

Dans cette interview, le secrétaire d'Etat chargé du Tourisme, revient sur les obstacles qui rendent difficile la relance du secteur touristique en Algérie. Le manque d'infrastructures, de promotion et surtout de culture touristiques, constituent de sérieuses entraves au secteur. En somme, pour M.Hadj Saïd, il convient avant tout de «construire» une destination touristique, car dit-il, l'Algérie n'en est pas une destination touristique. Du moins pour le moment...

L'Expression: À la veille des assises du tourisme, pouvez-vous nous faire un état des lieux de votre secteur?
Mohamed Amine Hadj Saïd: Il ne faut pas avoir peur des mots. L'Algérie n'est pas une destination touristique. Mais ce n'est pas la fin du monde, car nous sommes en train de construire une destination touristique. Il faut être franc avec nous-mêmes et dire les choses comme elles sont pour atteindre cet objectif. Si nous voulons qu'à la fin de ces assises, le tourisme se redresse, il nous faut prendre le taureau par les cornes. Néanmoins, nous avons les potentialités pour le devenir, car nous sommes des territoires touristiques d'excellence. Mais ce qui est encore plus merveilleux en Algérie, est le fait qu'on peut faire du multitourisme dans une seule région.

De nombreuses entraves freinent l'épanouissement du tourisme. Quelles sont, d'après vous, ces freins?
Le plus grand frein du tourisme national est pour moi le déficit en matière de promotion. Le tourisme ce n'est pas seulement avoir le produit, mais il faut aussi savoir le promouvoir. Donc, c'est la promotion touristique qui fait défaut. La communication est pour moi la base du tourisme. C'est un cercle vicieux. Du moment où nous ne communiquons pas, on ne connaît pas notre pays et ses potentialités touristiques, les investisseurs ne viendrons pas. La qualité ne s'améliorera pas vu que l'activité touristique sera moribonde, les prix ne baisseront pas.
Nous devons redoubler d'effort pour faire connaître aux Algériens leur pays. Les moyens de communication sont là, particulièrement avec les TIC, alors pourquoi ne pas les utiliser dans ce sens. C'est ce que je demande aux offices de tourisme qui doivent faire de petites opérations de communication via le Net pour se faire connaître auprès de leurs compatriotes.

Et la formation dans tout cela?
Justement, on a un énorme déficit en matière de formation. Il faut comprendre que nous avons deux sortes de déficit dans la formation, l'existant et le potentiel. L'existant c'est 97.000 lits qui fonctionnent actuellement, mais qui sont gérés par un personnel souvent pas assez formé ou pas formé du tout. C'est un personnel qui ne sait pas encore se comporter selon les normes de l'hôtellerie et la restauration. Et le potentiel, ce sont les lits que nous projetons de créer qui sont de l'ordre de 75.000 à l'horizon 2015. Nous devons donc nous pencher sur ce point qui est l'un des plus importants pour le développement touristique en Algérie. Construire une infrastructure, il n'y a pas plus facile quand il y a de l'argent. Mais, quand on construit un bel hôtel et la qualité de service n'est pas au rendez-vous, c'est comme si on avait rien fait. Nous devons professionnaliser le tourisme, car c'est un art qui doit être confié à des artistes.

L'hôtellerie reste un luxe en Algérie. Comment expliquez-vous que les prix des chambres soient aussi élevés dans notre pays, surtout que la qualité n'est toujours pas au rendez-vous?
Je vais vous étonner, il y a une relation entre la cherté et la qualité. Vous allez me dire quand il n'y a pas la qualité, cela devrait être pas cher. C'est ça le cercle vicieux dont je vous ai parlé. Vous avez bien dit c'est un luxe, un luxe c'est ce qui est rare. C'est la rareté qui fait la cherté de l'hôtellerie. Et c'est aussi cette rareté qui fait que la qualité n'est pas au rendez-vous, puisque, il n'y a pas de concurrence. Quand un établissement est seul sur le marché, il ne se casse pas trop la tête pour améliorer sa qualité de service. Ces établissements imposent donc leur loi.

Le tourisme est un secteur pourvoyeur d'emplois, mais qui n'est pas exploité dans ce sens. En ces moments de grogne sociale, allez-vous proposer au gouvernement des projets pour ouvrir plus de postes d'emploi dans le secteur?
Oui bien sûr, le tourisme est le plus grand secteur pourvoyeur d'emplois. En plus, c'est le seul secteur industriel au monde où la machine ne pourra jamais remplacer l'homme. Notre schéma directeur prévoit, à l'horizon 2015, la création de 75.000 lits. C'est un défi que nous réaliserons facilement car nous avons déjà bien avancé. Jusqu'à maintenant on a 50.000 lits sur les 75.000 qui sont en cours de réalisation. Ils connaissent 60% de taux d'avancement. Il est prévu qu'on les réceptionne à la fin de l'année 2013 ou au plus tard, début 2014. Et on a 32.000 lits entre des projets à l'arrêt et des projets qui n'ont pas encore été lancés. On est en négociation avec les banques pour les faire redémarrer car ce serait dommage de les abandonner, surtout qu'ils ont un taux d'avancement de 45%. Ces nouveaux lits vont automatiquement ramener avec eux des postes d'emploi. Les normes de l'Organisation mondiale du tourisme disent qu'un lit crée un demi-emploi direct et un emploi indirect. C'est-à-dire un emploi et demi. Une petite opération arithmétique et on déduit que nous allons créer près de 37.000 postes d'emplois directs à l'horizon 2015 et 75.000 emplois indirects pour la même période.

Le tourisme rural est pour vous une solution pour créer de la richesse dans l'Algérie profonde. Expliquez-nous?
Oui, je le dis et je le répète. Nous avons en Algérie un trésor inexploité qui est le tourisme rural. L'Algérie profonde qui souffre du chômage, mais qui peut être solutionné grâce à ce genre de tourisme. Nous pouvons créer de la richesse et de l'emploi dans ces zones rurales. Il y a certains petits exemples à Ghardaïa où des maisons de campagne ont été transformées en maisons d'hôte. Ce sont de très beaux exemples à suivre. En plus, avec les nouvelles infrastructures routières, ces zones rurales ne sont pas très loin des grandes villes.

Avez-vous un dernier mot à adresser aux Algériens qui attendent beaucoup du développement du tourisme dans leur beau pays?
J'ai un message à faire passer à mes concitoyens qui est de faire preuve d'éco-citoyenneté. La meilleure façon de montrer à notre pays que nous l'aimons, c'est de l'entretenir.

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