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Omar Bessedjerari, chef de sécurité et manager de Hasni

«Personne n’a pu remplacer Hasni…»

Il est issu d’une famille sportive à Oran. Ce vieux monsieur, on ne dirait pas aujourd’hui, mais il a bien connu les affres du terrorisme durant la décennie noire, mieux ! Il a assuré la sécurité de pas mal de chanteurs algériens dont Hasni avec lequel il se déplacera partout à travers le pays, jusqu’à devenir quasiment son manager en décidant pour lui ce qui était bon ou mauvais pour sa carrière, son image auprès du public..Dans cet entretien des plus émouvants, l’homme qui se mettra d’ailleurs, à pleurer plus d’une fois, a accepté de feuilleter avec nous les pages du passé en évoquant le doux souvenir de Hasni, la mémoire intarissable et immortelle du raï sentimental…

L'Expression: Des années après la mort de Hasni que vous avez fréquenté pendant les années 1980 à 1995,vous en gardez quel souvenir?
Omar Bessedjerari En fait, j'assurai sa sécurité. J'étais le responsable de sécurité.Il y avait aussi Zinou, mort suite à une maladie. Nous avons travaillé pendant pas mal d'annéeS ensemble. On a fait Annaba, Alger plusieurs fois, Oran toutes les salles, au théâtre de verdure...on organisait les soirées où il devait se produire. Il était bien apprécié par le public, parce que c'était la première fois qu'un artiste s'exprimait dans le sentimental. Il n y avait pas beaucoup de chanteurs dans ce style à l'époque.

Vous gardez quelle image de lui aujourd'hui?
L'image que j'en garde et celle qui m'a le plus touché et que je n'oublierai jamais est liée à sa grande générosité...Un jour on était là à la terrasse d'un café, il m'a demandé d'aller faire un tour rue de la Bastille et là, il y avait une vie lle dame qui mendiait à côté du boucher où elle prenait ce qui restait du poulet. Il l'a fait rentrer dans le magasin et il lui donné un paquet d'argent. Il l'a fait levé alors qu'elle était assise par terre, il l lui a dit: tiens de l'argent et pars! il n'aimais pas voir cette femme mendier (moment ému, larmes). Ce souvenir m'a marqué.

Parlez-nous de votre relation avec lui...
J'étais responsable de la sécurité au niveau de l'Acvo, l'Association culturelle de la ville d'Oran. J'en étais membre aussi. Je me déplaçais avec les chanteurs de la wilaya d'Oran. Je prenais pas mal de chanteurs avec moi. Je peux citer les artistes de l'époque: cheb Kadirou, cheb Abdelhak, cheb Tahar, chaba Essaghira etc, on se déplaçait ensemble pendant les années 1990. On passait les soirées ensemble. On a traversée une période vraiment noire, sombre. Hasni faisait partie de ces artistes avec lesquels j'ai travaillé et devenu un ami proche par la suite...

Comment faisiez-vous justement?
Mon travail consistait à faire sortir les familles de chez elles et les amener assister aux concerts, aux soirées raï au théâtre de Verdure notamment. J'arrivais à les inciter à sortir et à venir s'amuser. Il y avait des gens. Les gens sortaient. Je rentrais à pied à deux heures du matin jusqu'à chez moi. On avait plus de liberté qu'à Alger, mais j'étais menacé de mort par les terroristes. Mon nom était inscrit dans les mosquées, comme condamné à mort. La sécurité, El hamdoulah était là.
On vous a vu, hier, avec Boualem Benhaoua de Disco Maghreb....
Je suis un ami de Boualem Benhaoua. On se connait bien avant Disco Maghreb qui d'ailleurs n'était pas là. Il était au niveau de la rue la bastille, en face de la grande poste. Apres, ils l'ont déplacé ici car le restaurant était au 5eme étage et les artistes venaient ici. J'ai travaillé aussi avec beaucoup de chanteurs.

Que devenez-vous aujourd'hui?
J'ai été élu à l'APC d'Oran grâce au mandat passé. En plus de cela, je suis un membre du parti FLN d'Oran. Maintenant je suis âgé. On m'a demandé de venir donner un coup de main au théâtre de verdure, mais j'ai refusé car le charme n'est plus ce qu'il était. Aujourd'hui j'ai 64 ans, je ne peux pas donner de mon énergie et de mon temps avec la nouvelle génération. Cette dernière n'a pas froid aux yeux. À l'époque, je faisais sortir les jeunes de chez eux. Ils venaient pour danser, se changer les idées, pour oublier tout le mal qui existait l'époque. Des familles entières venaient au théâtre de verdure, des couples, aujourd'hui on trouve beaucoup de cas sociaux parmi les jeunes...je faisais partie de l'association culturelle d'Oran qui organisait les concerts et moi j'assurai la sécurité en faisant attention à ce qu'il n y ait pas de grabuge, mais avec le temps, on devient tous pareil..Cela crée des liens. On devient une famille. j'ai travaillé aussi avec Khaled, Mami, Zahouania,, Bilal, Majda Erroumi, George Wassouf, tous ces gens, j'ai été proche d'eux. J'ai travaillé avec eux.

Comment trouvez-vous le raï aujourd'hui?
Le vrai rai, est bien celui d'avant. ÇCa commence par le bédoui. Et le bédoui c'est Oran. Mais maintenant, je ne comprends pas qu'on veuille déplacer le festival du raï ailleurs. On a transposé le festival du raï à Bel Abbès ce qui est une aberration. Le wali d'Oran de l'époque, Bensekran était un élu de Sidi Bel Abbès, voila pourquoi, mais ça n'a pas réussi. Cette année il est revenu au bercail, c'est-à-dire à Oran. Mais les organisateurs sont de Sidi Bel Abbès. S'agissant de la musique, le raï d'antan se jouait avec des instruments authentiques; la musique était originale. Maintenant, on utilise la boîte à rythme. C'est moderne mais ca perd de son charme d'avant.

Un mot sur le Hasni jeune, sur ses débuts...
Hasni avant était un joueur de football. Il jouait au club de foot d'Oran dans la section cadet et junior. Apres, il est rentré dans le domaine du raï et il s'est spécialisé dans le raï sentimental. Il s'inspirait un peu dans sa façon de chanter de George Wassouf. Il a, d'ailleurs, fini par reprendre une de ses chansons dans son répertoire. George Wassouf a chanté du Hasni lui aussi. il a chanté «Tab ghiabek ya ghazali», il l'avait chantée un soir en présence de George Wassouf. Quand ce dernier est revenu en Algérie, il nous a demandé d'aller visiter sa tombe...pourtant il est chrétien. L'Algérie a refusé, car on avait peur pour sa sécurité.

Comment Hasni a débuté dans la musique?
Hasni a débuté le raï au sein de l'Union Nationale de la Jeunesse Algérienne à Gambetta. Il chantait avec ses amis. Il était mince. Il se produisait dans les mariages sous une tente. Il reprenait les chansons de raï connues de l'époque, notamment des morceaux de Belkacem Bouteldja, et puis il a rencontré Kader Sonacom qui s'est mis à lui écrire les paroles. C'est lui qui lui a donné un coup de main pour réussir.. Celui avec lequel il a bien travaillé c'est Boualem de Disco Maghreb. Tous ses disques sont disponibles chez lui dans son magasin. Boualem estn, d'ailleurs, le premier à avoir cru en Hasni. Il est devenu son ami. Un ami proche. C'est pour cela qu'il a édité tout ses disques. Boualem soutenait les artistes. Il les aidait même financièrement. Bouelam était généreux avec tous les chanteurs.

Une anecdote sur Hasni l'homme simple?
Hasni était un homme très généreux. Il aidait des familles entières à subvenir à leurs besoins, pendant les fêtes de l'Aïd... Trois familles de Gambetta étaient totalement prises en charge par Hasni, que ce soit en matière de fournitures scolaires, ou pendant le mois de Ramadhan entre autres etc. Hasni était issu d'une famille modeste, mais Dieu l'avait pourvu de moyens. Il était reconnaissant et il savait ce que c'était la pauvreté. C'est pour cela qu'il aimait donner à son prochain..

Et musicalement?
Au tout début, Hasni s'était lancé dans un tout autre registre de musique, mais il a préféré se tourner vers la chanson sentimentale où il a connu un grand triomphe grâce à ce style..Les chansons de Hasni étaient toutes destinées à sa femme, mais je ne peux pas en dire plus, notamment sur le couple, lui et sa femme..Hasni a laissé un vide. Pas seulement pour moi, mais chez tout le peuple. Il était apprécié par tous. À Oran il était beaucoup plus aimé, voire vénéré. Il a souffert avec nous à Oran. Nous on vivait avec lui. C'était l'enfant d'Oran. On le voyait tous les jours. Aprés sa mort, la chanson «Mazel kayen l'espoir» a fait un boom. Hasni était jalousé aussi par certains clans, alors il a sorti le titre «Hasni mat». Hasni enregistrait rapidement des morceaux en effet, car il sentait l'appel de la mort s'approcher. Il a laissé un riche répertoire. Dieu lui a légué un vrai don. S'il était encore vivant, il aurait encore évolué. Je me souviens encore de ce concert, SOS Somalie, de 1992. Un monde fou était venu pour lui. «Ammi Hmed» est monté me voir. Il y avait avec moi la chanteuse Cylia et Abderahmane Djalti. Il est venu nous demander de laisser Hasni monter sur scène, pour que le public puisse le voir au moins. J'ai refusé! Car cela aurait gâché la surprise. Il est monté sur scène à six heures moins dix du matin. Pour le moment personne ne pourra et n'a pu le remplacer. Hasni est unique.

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