La grande illusion du peuple
«La destinée d´un peuple se compose de ceux qui visent à la gloire et de ceux qui visent à la fortune.» (Saint-Just 1767 -1794)
Sous le socialisme étatique de Boumediène, le peuple n´en pouvait plus de supporter la dictature du parti unique du FLN; la répression de la sécurité militaire et l´autorisation de sortie du territoire national, le premier visa de voyager que s´était inventée l´Algérie indépendante à elle-même. Boumediene mort, son successeur, Chadli Bendjedid, supprima l´autorisation de sortie, créa un poste de premier ministre virtuel pour faire sérieux et ouvrit les ports et aéroports aux candidats au départ et aux pionniers de l´import-import, qui, depuis, ont fait bien des petits. S´apercevant au bout de quelques bals à musette et quelques va-et-vient entre son quartier et la France qu´il n´était toujours pas heureux, le peuple se révolta contre le régime de Chadli qui n´était ni capitaliste, ni socialiste, ni rien. Il cassa tout, brûla les portraits de l´Etat et de son parti et se lança dans la mode de la barbe et du kamis. Puisque ni Boumediene, ni Chadli, ni le FLN, ne purent le rendre heureux, il lui resta le bon Dieu. Seul Dieu pouvait lui assurer le bonheur et le paradis sur terre, pensa le peuple. Mais, selon l´Islam et toutes les autres religions, on n´accède pas au paradis gratuitement. Il faut payer, il faut passer par le purgatoire pour se purifier de ses péchés. Et le peuple paya lourdement tous ses péchés. Enfin guéri, le peuple se dît qu´avec Bouteflika il va être heureux.
Là encore, après les présentations et le verre de l´amitié, le peuple constata avec le temps que ce bonheur si voulu n´est toujours pas là. Depuis, il rouspète, manifeste, brûle des pneus, barre des routes, se rue sur les bateaux et les avions, et même à la nage pour fuir le purgatoire qui, selon lui, dure trop longtemps. Bouteflika et le gouvernement ne comprennent pas l´ingratitude de ce peuple. Des milliers de logements réalisés et distribués, des ponts et autoroutes, des augmentations de salaires, la liberté de voyager, les voitures neuves que l´on peut acheter à crédit et sur place sans recourir à l´achat, auparavant, d´une dérogation chez une fille, un fils de chahid ou un ancien moudjahid, le téléphone portable qui libère du bon vouloir du directeur des PTT d´autrefois, les journaux qui écrivent ce qu´ils veulent et dans lesquels le peuple peut se plaindre, la disparition des pénuries alimentaires...ouf! Tant de nouveautés et de libertés et ce peuple qui continue à crier et à réclamer. Que veut-il à la fin? Sortir du purgatoire pour atteindre le paradis, l´Eden répond le bon peuple. Mais sait-il au moins que le temps sur terre n´est pas le même au purgatoire? Un jour au purgatoire équivaut à 50.000 ans sur terre, nous disent les Saintes Ecritures. Le temps dans l´au-delà n´est pas celui d´ici-bas. Il faut l´intérioriser, y être dedans pour voyager avec, vers les portes du paradis. Cela fait plus de vingt siècles que l´homme questionne le temps pour avoir des réponses. Les philosophes Socrate et Platon, puis Descartes et le siècle dernier, Leibniz, ont passé leur vie à saisir la dimension du temps.
Chez les scientifiques, il a fallu Copernic, Galilée, Newton et, le siècle dernier, Einstein, pour comprendre que le temps n´est pas le même selon qu´on soit sur terre ou dans le ciel. Pour percevoir le temps et combien il lui en faudra pour sortir du purgatoire, le peuple n´a qu´une solution: retourner sur terre, à l´école pour comprendre la loi de la relativité contenue dans la formule E=mc².
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