{{ temperature }}° C / {{ description }}

Cité introuvable.

Hommage: Monseigneur Henri Teissier

Un homme de coeur et de paix

Il aimait aller à la rencontre de ses compatriotes musulmans avec lesquels il se sentait très à l'aise. Le dialogue islamo-chrétien lui tenait à coeur et il avait fait sienne la mission d'oeuvrer dans ce sens.

Par Ghenima Rekis Kemkem*

Mgr Henri Teissier, l'archevêque émérite d'Alger, s'est éteint, ce mardi 1er décembre, à l'âge de 91 ans en France à l'hôpital Edouard-Herriot de Lyon.
J'étais encore jeune étudiante quand j'ai rencontré pour la 1ère fois Monseigneur Henri Teissier. C'était au hasard d'une visite chez Marcel Bois, mon ancien professeur de français au lycée, un autre grand humble de l'Eglise, qui nous a quittés il y a peu, où j'allais en quête d'ouvrages à lire. Et c'est beaucoup plus tard que j'avais réalisé la grandeur de cet homme qui engageait la conversation avec mon professeur en m'y associant très naturellement et humblement. D'autres heureuses rencontres culturelles suivirent plus tard, durant lesquelles j'ai eu l'occasion d'en apprendre plus sur cet homme d'exception et d'apprécier ses qualités.
Il aimait aller à la rencontre de ses compatriotes musulmans avec lesquels il se sentait très à l'aise. Le dialogue islamo-chrétien lui tenait à coeur et il avait fait sienne la mission d'oeuvrer dans ce sens. Ce conférencier d'une grande intelligence, avait aussi des qualités de véritable conteur. Il avait l'art de vous transporter, était d'une grande subtilité et avait un sens de l'humour dont lui seul avait le secret, ce qui rendait sa compagnie très agréable en plus d'être enrichissante.
Né le 21 juillet 1929 à Lyon, cet homme d'église, franco-algérien, au grand coeur, a été un véritable monument de l'histoire de l'Algérie et de son Église. Il fait ses études au séminaire des Carmes, à Paris, il apprend l'arabe à l'Inalco. Il se rend en Egypte, à l'institut dominicain du Caire. C'est là qu'il prend conscience de l'aspiration des pays sous occupation coloniale à leur indépendance..
En 1955, il est ordonné prêtre pour le diocèse à Alger, Il prend partie pour l'indépendance de l'Algérie, tout comme Monseigneur Duval qui avait gagné le prénom de Mohamed. De même qu'il choisit, ainsi que l'avait fait avant lui le cardinal Duval, la nationalité algérienne qu'il obtient à l'indépendance. En 1972, il est nommé évêque d'Oran, puis, en 1980, archevêque coadjuteur auprès de Mgr Duval, auquel il succède en 1988 et sera archevêque d'Alger en 1988.
Pendant les années du terrorisme, il refuse de quitter l'Algérie, ce pays auquel il est profondément attaché, en dépit des menaces et les assassinats de Mgr Pierre Claverie, évêque d'Oran, et des moines de Tibhirine. Il avait l'habitude de rendre visite régulièrement à ces derniers, dans les montagnes de l'Atlas, près de Médéa, n'hésitant pas à prendre des risques qui pouvaient lui coûter la vie jusqu'à ce jour, en 1996 où le drame arrive et où sept d'entre eux sont enlevés puis assassinés. Quand il évoque la décennie noire, Mgr Henri Teissier parle de «martyrs chrétiens et musulmans» de son pays, l'Algérie, en précisant que les chrétiens étaient visés au même titre que la population algérienne.
En janvier 2018, c'est Mgr Henri Teissier qui avait conduit Nicolas Sarkozy, le président de la République française sur la tombe des moines en Algérie. C'est également lui qui fut à l'origine de la béatification de ces moines par le pape.
Très affecté par l'assassinat de ses frères de Tibhirine, il ne cessait de rappeler leur générosité. Il fut, durant cette sinistre période de terrorisme en Algérie, le compagnon de tous les instants pour tous les chrétiens, mais aussi tous les Algériens investis dans le dialogue islamo-chrétien et dans l'instauration de la tolérance et le respect entre les peuples. Il avait mené ses actions et oeuvré, il est important de le préciser, loin de tout prosélytisme.
En 2008, le pape Benoît XVI accepte sa démission. Mgr Henri Teissier est l'auteur de plusieurs ouvrages sur la situation de l'Eglise en terre d'Islam. Il avait écrit, notamment «Tibhirine: la fraternité jusqu'au bout» 2012; «Eglise en islam: méditation sur l'existence chrétienne en Algérie» 1984; «Histoire des chrétiens d'Afrique du Nord» 1991; «Chrétiens en Algérie: un partage d'espérance» 2002...
En 2018, il se rend en France, dans sa ville natale, mais tout en continuant, en grand homme d'église et en grand humaniste, à oeuvrer pour le dialogue islamo-chrétien qui lui était si cher. Ainsi, lors d'une Conférence-débat sur les religions monothéistes, qui avait pour titre: «Paix et tolérance», il disait que le terme «Salam» constituait l'un des fondements du christianisme. Il précise en soulignant que l'Islam, le Christianisme et le Judaïsme sont certes trois religions différentes, mais ont une source et une finalité commune: le bonheur de l'humanité. Message à méditer!
Mgr Henri Teissier nous a quittés, ce mardi 1er décembre 2020. Il est parti rejoindre Mgr Léon-Étienne Duval, Mgr Pierre Claverie, les moines de Tibhirine, le père Marcel Bois et bien d'autres frères qui avaient oeuvré pour la fraternité, le dialogue islamo-chrétien et qui ont laissé leurs empreintes dans ce pays, l'Algérie, qu'ils ont tant aimé. Puissent-ils tous reposer en paix. Que la terre qu'ils ont aimée leur soit douce et légère et puisse leur message d'amour, de fraternité être entendu et médité.

* Enseignante, formatrice de formateurs, retraitée.

De Quoi j'me Mêle

Placeholder

Découvrez toutes les anciennes éditions de votre journal préféré

Les + Populaires

(*) Période 7 derniers jours