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L’affaire des moines de Tibhirine remise sur le tapis

L’immixtion déguisée de la France

Relancer l’affaire des moines de Tibhirine qui a toujours été brandie pour appuyer la thèse du «qui tue qui ?».

Après 23 ans de polémiques, de thèses et d’antithèses, d’expertises scientifiques et même une béatification, la mort tragique des moines de Tibhirine continue d’alimenter la controverse. Le drame des sept trappistes victimes de la horde terroriste en mai 1996, selon la version officielle algérienne - longtemps contestée de l’autre côté de la Méditerranée - est à nouveau d’actualité. Dans une lettre datée du 21 juin dernier, Me Patrick Baudouin, l’avocat des familles des sept moines de Tibhirine, s’est appuyé sur «l’évolution de la situation politique en Algérie» pour demander aux magistrats de délivrer une nouvelle commission rogatoire internationale afin que l’ex-président de la République, Abdelaziz Bouteflika, «sous réserve que son état de santé le permette», et l’ex-chef des services de renseignements, le général Mohamed Mediène, dit Toufik, puissent être entendus «le plus rapidement possible».
Dans son courrier, Me Baudouin explique que «le défaut de coopération de la part des autorités algériennes n’a pas permis, jusqu’à présent, de recueillir tous les éléments d’information nécessaires sur les conditions de l’enlèvement, de la détention et de l’exécution des moines de Tibhirine», notamment sur «les actions des services de renseignement et de sécurité».

Pourquoi maintenant ?
Pour justifier sa demande, l’avocat a rappelé la déclaration de Abdelaziz Bouteflika, en avril 2004, sur le plateau de LCI, à propos de l’assassinat des moines. L’ex-président avait, à l’époque, en réponse à la question du journaliste, déclaré que «toute vérité [n’était] pas bonne à dire à chaud». L’audition du général Mohamed Mediène se justifie évidemment par le fait que ce dernier était à la tête des services de renseignement et de sécurité, au moment du drame. S’il n’est pas contestable aux familles des victimes leur droit de chercher à connaître la vérité sur la mort des leurs, le moment choisi pour revenir à la charge ne semble pas du tout fortuit. Relancer l’affaire des moines de Tibhirine, qui a toujours été brandie pour appuyer la thèse du «qui tue qui ?», à ce moment précis, semble répondre à un canevas précis. L’Algérie, qui est en pleine crise politique depuis quatre mois, n’a eu de cesse, par la voix de millions d’Algériens et depuis le début de sa révolte pacifique, d’exiger la non-ingérence de la France dans sa «sauce interne». L’exigence du témoignage de l’ex-président Bouteflika et de l’ex-chef du DRS (actuellement en détention) en ce moment précis, ressemble à une tentative d’immixtion déguisée. Sinon, comment expliquer cette demande en pleine crise ? En fait, la France semble brandir la menace de remettre au goût du jour la thèse mettant en cause l’implication des services de renseignements dans la décennie noire afin de s’offrir l’opportunité de défendre et de négocier ses intérêts stratégiques en Algérie. En affirmant que son action est motivée par «l’évolution de la situation en Algérie», Me Patrick Baudoin laisse entendre que l’Algérie n’est pas assez forte actuellement pour accuser le coup.

Un signe de fraternité
Pour revenir au dossier des moines de Tibhirine, il y a lieu de rappeler qu’un documentaire, largement repris par le magazine hebdomadaire Marianne, diffusé sur France 3, a apporté un bel éclairage sur cette affaire, en faisant appel aux témoins et acteurs de ce drame du 21 mai 1996. «Le martyre des sept moines de Tibhirine» revient sur ce tragique épisode en s’appuyant sur le témoignage de certains membres du GIA dont des proches lieutenants de Djamel Zitouni, l’ «émir» du groupe terroriste. Les journalistes-réalisateurs ont été à la rencontre de ces personnages qui ont maintenu leur version des faits avec force détails sur le déroulement de l’incursion dans le monastère jusqu’à l’exécution au couteau et de sang-froid des sept religieux. Deux rescapés ont raconté l’enlèvement des moines, mais pas seulement le témoignage de l’«émir» de Tablat, Abou Mohamed, a été diffusé et ce dernier a apporté la preuve que les moines ont été «décapités» sur ordre de Djamel Zitouni, puisque c’est lui qui a transporté les têtes et les a déposées à Médéa. Mais cela ne semble pas suffire à convaincre. Il y a lieu de rappeler enfin, qu’en décembre 2018, la ville d’Oran a accueilli, en la chapelle Notre-Dame de Santa-Cruz, une cérémonie de béatification de 19 religieux catholiques dont les sept moines de Tibhirine, tous assassinés en Algérie durant la sanglante période du terrorisme. Cette cérémonie, une première dans un pays musulman, a été un événement inédit. Souhaitée par l’église catholique d’Algérie et le Saint-Siège et fortement soutenue par les autorités algériennes, l’élévation des chrétiens assassinés au rang de bienheureux s’est voulue un signe de fraternité entre les musulmans et les chrétiens. Un symbole de communion et un instant de paix retrouvée.

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