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Docteur Hocine Khalfi, médecin spécialiste et président du comité local du CRA de Rouiba, à l’Expression

«Attention que cette fête ne se transforme en deuil !»

Le docteur Hocine Khalfi, est chirurgien pédiatre. Il est également président du comité local du Croissant-Rouge algérien section de Rouiba. Avec une trentaine de jeunes bénévoles, ils mènent depuis plus de 4 mois le combat de la sensibilisation en parallèle d'actions de désinfections. Il nous parle des actions qui ont été prévues durant l'Aïd El Adha et sensibilise surtout les citoyens quant au respect des règles d'hygiène et de distanciation sociale lors du rituel. Le docteur Khalfi s'inquiète également des traditionnelles visites familles qui, selon lui, peuvent être encore plus dangereuses que le rituel. Ecoutez-le, c'est un homme de terrain qui parle...

L'Expression: Bonjour docteur, on est à la veille de l'Aïd El Adha. Comment voyez-vous la situation épidémique du pays?
Docteur Hocine Khalfi: Pour être franc avec vous, je suis très inquiet! Je suis tous les jours sur le terrain et j'ai l'impression que le mal est en train de se faire! On le constate rien qu'en jetant un coup d'oeil dans la rue avec ces attroupements et regroupements que l'on voit à chaque coin de rue. Il y a aussi le non-respect des règles d'hygiène et de distanciation sociale instaurées par les autorités sanitaires. Même le port de la bavette n'est pas encore généralisé. Les préparatifs de l'Aïd El Adha ont, à mon avis, augmenté ce relâchement. Maintenant je suis revenu d'Alger vers mon lieu de travail à Aïn Taya, j'ai pu constater ce type de dépassement, notamment avec l'achat des ovins. Les gens sont collés les uns contre les autres sans aucune protection. On risque de payer encore une fois les lourdes conséquences de ce laisser-aller. Les gens doivent comprendre que ce virus est mortel et que l'on ne peut pas continuer à vivre comme si de rien n'était!

Justement, pensez-vous qu'il y ait un manque de conscience ou n'est-ce qu'un relâchement?
Les autorités sanitaires, les autorités locales et la société civile mènent depuis 4 mois une guerre de sensibilisation en parallèle à celle qu'est en train de mener le personnel médical. Mais il y a encore des personnes qui prennent les choses à la légère. Que ce soit dans le cadre de mon activité médical ou de mon travail de bénévolat avec le Croissant-Rouge algérien (CRA), j'ai remarqué que les citoyens croient de moins en moins à la maladie. À travers nos discussions avec des personnes, on nous sort diverses théories du complot quand ce n'est pas une interprétation, qui les arrange, de la religion afin de justifier leur incivisme. Je ne veux pas être pessimiste, mais l'inconscience prend de plus en plus de l'ampleur malgré tous les efforts de sensibilisation déployés. On est arrivé à voir que ce sont les personnes qui portent des bavettes sans cesse qui sont pointées du doigt dans la rue. Il est temps de dire stop, il y a des dizaines de morts par jour et des centaines de personnes infectées dont on ne connaît pas encore les séquelles que laissera ce virus dans le futur. Alors prenons toutes nos responsabilités et soyons vigilants.

Docteur, ne craigniez-vous pas une explosion des cas après l'Aïd El Adha?
Nous devons faire attention que cette fête ne se transforme pas en deuil. La situation est relativement maîtrisée, ces derniers jours, mais il reste que nous enregistrons plusieurs centaines de cas par jour. Cela sans parler des porteurs sains qui circulent dans la nature. Le rituel de l'Aid El Adha et l'abattage sont synonymes de regroupement humain. Qui dit regroupement humain, dit augmentation de risque de contamination par le Covid-19. En tant que scientifique, j'estime qu'il aurait été plus judicieux d'annuler l'Aïd El Adha dans ces conditions de pandémie mondiale, néanmoins puisqu'il a été décidé de le maintenir, il faudra être le plus prudent possible, en évitant tout contact inutile. D'ailleurs, avec ma jeune équipe de bénévoles du CRA de Rouiba, nous sommes en train de sillonner la ville pour appeler les gens à la prudence et leur rappeler les gestes barrières qui leur éviteront l'irréparable.

Effectivement, la prévention étant le meilleur des remèdes, quels conseils donnez -vous à nos lecteurs?
Comme je l'ai déjà dit, la décision la plus sage aurait été de faire abstraction du sacrifice pour cette année à cause de la situation exceptionnelle qui touche le monde entier. Mais pour ceux qui ont quand -même décidé de perpétuer le sacrifice d'Abraham, je les appelle à faire très attention. J'insiste énormément sur le respect de la distanciation sociale et le port du masque. Il faudra éviter l'échange des ustensiles et autres couteaux et surtout ne pas gonfler le mouton à la bouche avant de le dépecer. L'utilisation d'une pompe est plus que nécessaire en ces temps de pandémie. Il faut également éviter qu'il y ait trop de personnes qui participent aux sacrifices. Cela doit se restreindre au cercle familial qui a l'habitude de se rencontrer. En parlant de la famille, les visites entre une famille et une autre sont encore plus dangereuses que le rite du sacrifice. Le déplacement des personnes permet un déplacement rapide du virus. C'est une phase difficile, mais on doit respecter les consignes sanitaires si on veut en finir avec ce virus, dont le seul remède demeure la prévention.

Un dernier mot docteur?
Je tiens à insister auprès de mes concitoyens sur le respect des règles d'hygiène et de distanciation sociale. C'est la meilleure aide que vous pouvez fournir au personnel médical qui est depuis plus de 4 mois au front contre cet ennemi invisible. Je profite de l'occasion afin de rendre hommage à tous mes confrères et le personnel médical qui, malgré la difficulté de la tâche ne perd pas pied. Je rends hommage également aux bénévoles qui mènent eux aussi un autre combat. À l'exemple de la trentaine de jeunes du CRA de Rouiba qui, depuis le début de la crise sanitaire, n'ont ménagé aucun effort pour venir en aide à leur prochain et le sensibiliser sur les dangers du Covid-19. Nous avons ainsi distribué plus de 4500 gros colis à travers toute la wilaya déléguée de Rouiba. Cela sans parler des actions de désinfection et de nettoyage qui sont faitss quotidiennement, que ce soit au niveau des institutions, infrastructures publiques ou dans les quartiers que nous sillonnons tous les jours. Actuellement, en coordination avec les autorités locales nous avons mis en place un chapiteau devant la poste de la ville pour sensibiliser les citoyens sur le respect des distances de sécurité et des règles d'hygiène. Nos bénévoles aident même à l'organisation des files d'attente pour éviter l'anarchie. Je rappelle que deux d'entre eux ont été infectés. Je leur souhaite un prompt rétablissement, et un Aïd Moubarek à eux et à tous les Algériens.

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