{{ temperature }}° C / {{ description }}

Cité introuvable.

Mohammed Attaf (écrivain)

«Les Berbères ont défendu leur histoire»

Mohammed Attaf est un écrivain qui a vécu et vit toujours dans la ville de Tizi Ouzou. Tous ses livres sont liés, d'une manière ou d'une autre, à cette ville. Il est l'auteur de plusieurs romans, recueils de nouvelles, recueils de poésie et essais. Il se livre à coeur ouvert à L'Expression.

L’Expression : Dans vos derniers livres, vous exprimez un intérêt particulier à ce qui a trait à la culture et à l’histoire amazighes de l’Algérie, pourquoi avez-vous choisi de vous pencher sur cet aspect ?
Mohammed Attaf : Dans l’écriture, on ne fait aucun choix ! Les thèmes se succèdent l’un après l’autre, certes au gré de l’inspiration, mais parfois un thème vous conduit vers un autre sans vous en rendre compte et, à chaque fois, on fait tout pour bien le cerner et l’enrichir, d’abord par la narration, qu’elle soit romancée ou historique, ensuite en mettant en relief et en évidence le message à transmettre. J’ai commencé par la poésie, je suis passé ensuite à la nouvelle et sans transition au roman. Mais quand que j’ai publié « Tizi Ouzou à travers les âges » et « Chant d’angoisse et de colère», je me suis rendu compte que l’histoire est un domaine aussi riche, sinon plus riche encore que les autres types d’écriture. L’histoire nous révèle la grandeur et la richesse de notre passé millénaire et, en poussant les recherches, on découvre des trésors qu’on n’a pas le droit de passer sous silence et notre devoir est de les exhumer afin de les offrir aux lecteurs.

Votre dernier livre est une sorte de journal qui revient sur tout ce qui s’est passé depuis le Printemps berbère avez-vous consigné les événements racontés, chaque jour qu’ils se produisaient ou bien avez-vous travaillé sur la base d’une documentation ?
Pendant 30 années, soit de septembre 1971 à mai 2001, j’ai tenu un journal où j’écrivais presque tous les soirs, tous les événements, qu’ils soient politiques, économiques, sociaux, culturels, sportifs et même d’ordre général, qui se sont déroulés à Tizi Ouzou, en Kabylie, en Algérie. J’ai même noté certains événements qui se sont déroulés à l’étranger, mais qui étaient liés à l’Algérie. D’abord, j’ai publié l’essentiel de ces écrits sous le titre de « Chant d’angoisse et de colère » et tous ces écrits ont constitué pour moi une banque de données de notre histoire contemporaine, qui m’inspirent et me poussent à faire des ouvrages spécifiques à l’image de « Identité et Combat - Journal d’une revendication » qui vient d’être publié aux Editions Tafat. Comme un travail ne peut être complet que s’il est enrichi par la recherche dans une documentation qui propose d’autres informations, j’ai puisé dans d’autres sources pour me rapprocher le plus possible des événements que j’ai vécus personnellement et décrits au jour le jour.

Dans le même livre, vous ne parlez que de la région de Tizi Ouzou, pourquoi n’avez-vous pas évoqué les actions qui se sont déroulées, notamment dans le reste de la Kabylie, à Alger et dans les Aurès ?
Je ne voulais pas que tout ce que j’ai écrit sur la revendication identitaire, lors des événements du « Printemps berbère » et du « Printemps noir » ne tombe dans l’oubli et surtout pas dans l’indifférence. Donc, mon principal devoir c’était de mettre à la portée de tous les Amazighs, de tous les Algériens, l’histoire de leur combat, au jour le jour, en présentant les points forts et les points faibles, mais surtout l’engagement des Berbères qui ont défendu vaillamment leur histoire, et qui défendent leur présent et leur avenir afin de vivre dans la culture de leurs ancêtres et la transmettre aux générations futures. Certes, j’ai beaucoup évoqué, au jour le jour, les événements qui se sont déroulés en Kabylie, c’est parce que j’habite à Tizi-Ouzou et j’ai vécu, quotidiennement, tous les événements que j’ai écrits. Mais dans tous mes écrits, j’ai évoqué également ce qui s’est passé à Alger, dans les Aurès, mais aussi dans les régions qui étaient à la pointe de la défense de l’identité berbère, amazighe.

En quoi réside l’importance d’écrire sur l’histoire du combat identitaire pour la reconnaissance de l’amazighité ?
Ecrire l’histoire de sa région, de son pays est toujours motivant car, de nos jours, tous les peuples s’intéressent à leur passé et recherchent leurs origines avec tout ce qu’elles comportent comme valeurs, traditions, coutumes, culture et j’en passe. Pour ma part, il est donc important que je contribue à l’écriture de l’histoire de ma région, de ma culture amazighe dans laquelle ont baigné nos parents, nos grands-parents et toutes les générations d’avant. Vivre dans sa culture, dans sa langue, c’est vivre dans la fierté et la dignité !

Ces derniers temps, vous avez en quelque sorte « mis de côté » l’écriture romanesque, est-ce par manque d’inspiration ou pensez-vous avoir tout dit dans vos textes littéraires déjà édités ?
Je n’ai pas mis l’écriture romanesque de côté car quand on est poète, on ne peut rester sans lire ou écrire un poème, et quand on est romancier, on ne peut rester sans lire un roman ou écrire des textes romantiques. Quand on porte en soi « une passion », celle de l’écriture, on ne vit que pour elle et on ne peut la délaisser. Le monde dans lequel nous évoluons est une source inépuisable d’inspiration et cela, en plus de notre propre imagination. Pour ma part, je peux vous dire que dans mes tiroirs, j’ai quatre manuscrits achevés, mais qui dorment faute d’éditeur. J’ai un recueil de nouvelles, un roman, un recueil de poésie et un autre de contes. Vous savez, même si vous avez publié plusieurs ouvrages, certains éditeurs refusent vos manuscrits et d’autres ne vous répondent même pas. Dans l’écriture on ne peut jamais prétendre avoir tout dit tant il y a à dire et à écrire. L’essentiel est de trouver le fil qui vous conduit vers un sujet que vous maîtrisez et le conduire d’une manière correcte et intelligente vers le lecteur.

Votre roman « La sainte » et vos premiers livres sont épuisés des librairies et ils ne sont plus disponibles, peut-on savoir si leur réédition est à l’ordre du jour ?
Mes trois premiers livres « L’Arbre de la chance » édité en 2006, « Le Silence des murs », en 2007 et « La Sainte » en 2010 sont épuisés depuis des années. Dans « L’Arbre de la chance », je raconte mes souvenirs d’enfance dans les années 40 et 50 tout en remontant vers les années 30 et 20 pour décrire la misère vécue par nos parents imposée par un colonialisme affreux. « Le Silence des murs » est un recueil de nouvelles où j’ai touché à tous les sujets. Par contre, « La Sainte » raconte une histoire de jalousie extrême entre deux belles-sœurs, l’une naïve et pleine de bonté et l’autre, armée d’un plan machiavélique réussit à détruire le bonheur de deux innocents. C’est un roman qui a eu énormément de succès si bien qu’un cinéaste était intéressé pour l’adapter en film, mais sans résultat, faute de moyens financiers et de sponsors. Je suis intervenu maintes fois chez les éditeurs des deux romans, mais je n’ai rencontré que des refus avec toujours le même motif qui est : nous avons des difficultés et nous ne pouvons faire de la réédition. Pour « L’Arbre de la chance », j’ai même sollicité un autre éditeur, mais il a rejeté ma proposition tout en me demandant de lui proposer une nouveauté et non un vieux titre. La réédition de certains ouvrages ferait le bonheur de beaucoup d’auteurs !

Pour terminer, pouvez-vous revenir sur la période et le jour où vous avez reçu le prix Apulée décerné par la Bibliothèque nationale ?
« L’Arbre de la chance » a été bien accueilli par les lecteurs car je raconte une histoire vécue, réelle et cette histoire a été vécue aussi par tous les Algériens, qu’importe le lieu où ils ont vécu. Chaque famille tentait de survivre à une misère qui n’avait de synonyme que la faim, la soif, le chômage, l’humiliation, et le statut de forçat dans le travail, quand il était disponible. C’était mon premier livre, mon premier roman. Quand je l’ai présenté aux Editions Alpha, 15 jours plus tard, elles m’avaient donné leur accord pour sa publication. J’étais très heureux ! Enfin, j’ai réussi à franchir le premier pas sachant que d’autres suivront. Quelques mois à peine après son édition, j’avais lu une annonce de la Bibliothèque nationale d’Algérie, qui était dirigée à l’époque par l’écrivain Amine Zaoui, portant sur un concours intitulé « prix Apulée ». C’était en 2007 ! Et j’ai postulé au même titre que d’autres candidats. Le jour de la remise des prix, j’ai été convoqué à la Bibliothèque et quelle fut ma surprise quand j’entendis mon nom comme lauréat du « prix Apulée » en langue française pour mon roman « L’Arbre de la chance » !

D’après vous, qu’est-ce qui aurait séduit le jury, dans votre roman ?
Le jury a été sûrement sensible à l’histoire telle que vécue par tous les Algériens de l’époque. Ce fut pour moi le bonheur total qui m’ouvrit la voie vers la littérature d’une manière générale. Jusqu’à présent, par mes écrits, pratiquement, j’ai touché à plusieurs genres littéraires, notamment le roman, les nouvelles, la poésie, les chroniques, l’histoire et la biographie.

De Quoi j'me Mêle

Placeholder

Découvrez toutes les anciennes éditions de votre journal préféré

Les + Populaires

(*) Période 7 derniers jours