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Edition / «Naître à la mort»

Le regard philosophique de Farid Abache

Le livre pose un regard sur les énigmes inextricables qui entourent l’existence humaine…

Le romancier et poète Farid Abache, de Béjaïa, vient de publier un nouveau livre intitulé «Naître à la mort». Cet ouvrage paru aux éditions Spinelle en France, est constitué de deux parties, nous confie l'auteur. Comme son titre l'illustre parfaitement, ce livre est un essai philosophique sur le mystère qui entoure la vie de manière générale. Le livre pose un regard sur les énigmes inextricables qui entourent l'existence humaine. Farid Abache adhère, dans son livre, à la description donnée à la vie comme quoi cette dernière n'est autre qu'une maladie sexuellement transmissible: «Chaque fois que l'on donne naissance à quelqu'un, en fait on enfante un être à mourir.» Farid Abache rappelle aussi que la mort est greffée à la naissance même. «A partir du premier jour, on est un malade en phase finale, tout ce qui vient après est un cheminement vers la mort qui est la seule destination de l'humain passage. Et c'est l'unique certitude que l'Homme ait», martèle Farid Abache. Ce dernier consacre donc la première partie de son nouveau livre aux symptômes de cette maladie qu'est la vie. Farid Abache y décortique l'illusion du bonheur consistant à courir inlassablement derrière le bonheur, derrière les plaisirs. «Cette souffrance liée à cette course effrénée et inlassable derrière des joies est l'un des symptômes de cette maladie. Envisager un bonheur, affronter tous les malheurs en se fixant un but, un objectif, celui d'étreindre le bonheur... Malheureusement, dès qu'on l'atteint, le plaisir s'évapore; et une sorte de monotonie prend vite le dessus et l'on retombe dans le train-train quotidien. On est comme un chien que l'on fait haleter derrière quelque chose qu'il aime et que l'on éloigne continuellement de lui», résume notre interlocuteur.

Illusion du bonheur
L'autre symptôme de cette maladie, précise Farid Abache, réside dans le fait que vivre est d'être happé par le caractère éphémère et irréversible de la vie: les instants nous échappent tellement vite que l'on peine à les étreindre et à les apprécier; le présent n'existe quasiment pas; les instants filent vers le passé dès qu'ils surgissent. «On attend demain, et à peine arrive-t-il qu'il est aspiré par le Siphon du temps. On ne peut point l'apprécier. Lorsqu'on tend la main pour toucher, caresser et savourer l'instant présent, on ne touche malheureusement que de l'éphémère. Une sorte de volatilisation des minutes, un évanouissement des secondes qui meurent à la tierce même où elles adviennent. Ce caractère éphémère de la durée de vie de chaque être est exacerbé par l'irréversibilité qui fait que tout ce qui s'en va ne peut jamais revenir. Quelle souffrance de se savoir victime de cette irréversibilité qui clôt de manière définitive tout ce que l'on fait. Comme une épée de Damoclès, cette irréversibilité est là depuis la naissance; elle emporte de manière radicale chaque instant qui nous est offert...», écrit Farid Abache. Pour ce dernier, il y a un autre symptôme de la maladie de la vie. Il explique qu'il s'agit de son caractère absurde: être gouverné par l'arbitraire, par un hasard capricieux dont on ne comprend rien, rend l'Homme désemparé, perplexe et malade, incapable d'élucider les arcanes de cette existence.

Le mythe de Sisyphe
«C'est quoi la finalité de la vie? Nous sommes tous comme Sisyphe qui est condamné à rouler une pierre jusqu'en haut de la montagne; dès qu'il y arrive, la pierre lui échappe des mains, dégringole jusqu'en bas... Il reprend le même geste toute sa vie... Nous sommes tous comme lui, chaque jour nous prenons en charge un projet et nous trimons à le réaliser; en fin de journée, le projet n'est toujours pas réalisé ou bien un autre le remplace, et nous continuons à courir derrière la réalisation de nos projets qui ne sont que cette pierre que Sisyphe roule depuis la nuit des temps...», analyse Farid Abache en évoquant aussi l'ennui, ce mal du siècle et grand ennemi de l'Homme: se sentir vide, insipide; sentir les minutes trop allongées, interminables... Les heures et les jours prennent les proportions de l'éternité. Le poids du temps pèse sur le moral qui ne sait plus quoi faire pour y échapper... Puis Farid Abache parle de la vieillesse: vivre c'est aller de jour en jour vers la vieillesse, vers la perte progressive de sa force, de ses capacités, et s'acheminer vers la faiblesse, la fragilité. Assister à la dégénérescence de soi, à l'effritement de ses potentialités, au désagrègement de sa personne...Souffrance de l'être qui se décompose alors qu'il est encore «vivant»... La seconde partie de l'ouvrage de Farid Abache essaie de passer en revue les traitements palliatifs que les malades «condamnés» - que nous sommes tous - s'inoculent, se prescrivent ou se font prescrire afin de «bien vivre» ou de «bien mourir»: Parmi les soins palliatifs, - juste pour calmer la douleur et alléger la souffrance, vu que «vivre» est une maladie incurable -, on peut citer: la religion.
«Devant la complexité de la vie et l'impossibilité de trouver des explications satisfaisantes à tous les questionnements existentiels, l'Homme anxieux a préféré échapper à cette situation d'angoisse extrême et s'invente une force suprême qui a tous les attributs susceptibles d'élucider tous ces mystères. Du coup, cette force, que certains appellent Dieu, a toutes les qualités parfaites: il est omnipotent, omniscient, omniprésent et il est en mesure de trouver des solutions à toutes les misères de l'Homme...».

Passions artistiques
Un autre soin palliatif est de s'adonner à l'art, explique Farid Abache qui souligne qu'afin de se soustraire à cette terreur de vivre, il faut créer des passions artistiques... Du coup, l'amoureux du verbe trouve une fusion dans la poésie, y effectue une immersion passionnelle telle qu'il ne ressent plus ce poids terrible de la vie... D'autres voyagent dans la musique, dans la sculpture, dans la peinture, et quêtent auprès de ces escapades artistiques des soins palliatifs qui pourraient leur procurer un certain plaisir et leur faire oublier cette maladie de vivre... «Certains tentent de se calmer en s'adonnant à tant de potions (paradis artificiels) dont la vertu est de permettre à l'esprit de s'évader, de voguer vers des prairies de fantasmes et de rêvasseries... Baudelaire, Gautier et tant d'autres poètes s'adonnent au haschisch et autres drogues pour s'offrir des évasions mirifiques. Dans «Les Paradis artificiels», Baudelaire développe les sensations vertigineuses qu'il ressent. Ceci pourrait être un soin qui calme les esprits tourmentés par cette maladie qu'est vivre...», ajoute Farid Abache en évoquant une autre échappatoire qui n'est autre que le travail qui est l'obsession du siècle, considéré par beaucoup comme une contrainte, voire une corvée: le travail est aussi une occupation qui permet à l'esprit d'échapper à l'ennui, au spleen et d'alléger les symptômes du mal de vivre; en travaillant, on ne sent pas passer le temps, la tête est occupée par ce que l'on doit faire, et l'esprit du coup n'a pas le temps de se questionner, de se poser toutes les questions existentielles qui le taraudent... Autre soin palliatif et non des moindres c'est le divertissement, ajoute Farid Abache dans son livre en expliquant que le nom seul du divertissement suffit à expliquer l'apport positif qu'il peut procurer à l'esprit souffrant de tous les symptômes.
«Pascal a articulé sa philosophie autour du concept du divertissement. Passionné de chasse, il y cherche, l'oubli de soi, occupation de son esprit afin que celui-ci soit à l'abri de tous les questionnements existentiels angoissants, le temps de cette course derrière le gibier. Ce dernier n'est point important à ses yeux, tant s'en faut; ce qui l'intéresse c'est cette fougue, cet enthousiasme, cette focalisation corps et âme sur cette «ruée» au coeur de la forêt derrière une prise, dans le seul but de mettre en sourdine toutes ses angoisses et ses peurs.

Maladie incurable...
Le divertissement, sous ses aspects divers, permet à l'Homme d'oublier sa condition d'être vulnérable, voué à l'ennui, à la déréliction...», écrit encore l'auteur du roman «Condamnés à vivre». Avant de conclure en avançant que pour se soustraire au mal de vivre, certains se livrent à tous les plaisirs et, parmi ces derniers, le plaisir lié au corps est le plus prédominant; c'est lui qui procure la jouissance la plus fulgurante; c'est lui qui fait le plus oublier le malheur de vivre. D'autres plaisirs sont aussi à rechercher comme cultiver l'amitié, s'adonner au voyage et à la découverte des contrées lointaines... L'essai
«Naître à la mort» considère vivre comme une maladie incurable, donc le traitement ne peut être que symptomatique... «Seuls les symptômes peuvent être allégés ou soignés. Une panoplie de soins palliatifs sont décrits, particulièrement, le travail, le divertissement, et particulièrement les arts et toutes les passions. C'est une invitation à tout un chacun à trouver Sa Passion, Ses Passions, les cultiver, s'y livrer fiévreusement afin de calmer son esprit taraudé par l'Ennui, l'Ephémère, l'Illusion du bonheur, l'Absurde, la Vieillesse et tant de manifestations symptomatiques de cette maladie qu'est Vivre», conclut le «docteur» Farid Abache dans ce diagnostic accompagné d'un traitement qui pourrait s'avérer efficace pour les lecteurs les plus optimistes.

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