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SILA 2019 / Samia Zennadi (Editions Apic)

«L’éditeur est en difficulté...»

«Le front de libération des classiques africains... » est né à l’issue du 24e Sila, nous a confié la co directrice des éditions Apic qui fait avec nous un bilan assez mitigé du secteur de l’édition en Algérie… »

L’Expression : Quel bilan faites- vous à l’issue de ce Salon du livre, pas comme les autres cette année en raison de l’actualité...
Samia Zenadi : Cela fait trois ans que le secteur de l’édition souffre. Vraiment. On en a parlé l’année dernière. La presse y a consacré beaucoup de papiers. Les médias lourds aussi. Ce que je peux vous dire c’est que les retours qu’on a des libraires depuis le début du Hirak est que les gens ont la tête ailleurs. Ils ne vont plus en librairie. Ils s’occupent d’autres choses. Les ventes ont vraiment baissé. Ce sont les libraires qui nous renvoient les chiffres de vente. Depuis le début du Hirak, les gens n’achètent plus comme avant à la même période. Idem pour la question de promotion qui dépasse les mois de mars et d’avril. Or, ce n’est pas le cas cette fois-ci. Heureusement et je pense que c’est le cas pour la plupart des éditeurs, la Salon du livre devient une aubaine, d’abord pour rencontrer les lecteurs, les auteurs qui viennent signer et aussi pour essayer de poser nos problèmes qui durent depuis un certain temps. Le problème de distribution aussi qui reste malheureusement. Tout le monde se focalise sur le Salon du livre parce que c’est une occasion pour nous de vendre et renflouer un peu les caisses. C’est pour cela que c’est important pour nous le Salon du livre. Même si vendredi passé il n’y avait pas beaucoup de monde comparé aux foules des autres vendredis.

C’était un premier novembre et jour de Hirak…
Oui, avec l’arrêt des transports publics, nous avons un auteur qui devait signer et qui a choisi de signer pour le premier novembre. Il a eu lui-même du mal à arriver à la Safex. Le Sila c’est aussi la seule occasion où on peut parler de nos coups de gueule. C’est aussi la seule fois dans l’année où le journaliste discute avec l’éditeur car c’est vrai qu’il y a l’auteur, mais il y a aussi un métier qui s’appelle : l’éditeur qui est en difficulté. Parce que pendant des années nous avons vécu à coups de manifestations telles l’année de l’Algérie en France etc, Alger, capitale de la culture arabe …sans vraiment organiser le secteur de l’édition. Il y avait des éditeurs occasionnels. Même des auteurs occasionnels. Le réseau de distribution ne s’est pas du tout développé. On a des librairies qui ont été fermées, même s’il y a une ou deux qui ont ouvert, mais qui ne peuvent pas pallier tous les problèmes de distribution en Algérie. Il y a des villes qui sont toujours sans librairie. Les livres n’arrivent pas. D’où justement cette foule qui vient au salon. Ce n’est pas uniquement les Algérois. Beaucoup viennent de l’intérieur du pays. Pour eux, c’est l’occasion ou jamais, sinon jusqu’à l’année prochaine.
Les éditions Apic sont connues pour leur penchant littéraire qui tend vers le Sud, l’Afrique. Cette année, le Sénégal a été le pays invité d’honneur.

Un éditeur, le responsable de Papyrus Afrique du Sénégal, avec lequel vous êtes membre de l’Alliance internationale des éditeurs indépendants nous a parlé de vous en évoquant d’éventuels partenariats. Qu’en est-il alors ?
Nous sommes en effet en contact. Puisque on parle de littérature africaine, 2019 c’est 50 ans après le premier Festival panafricain, qui était une réponse au festival de 68 qu’avait organisé Senghor au Sénégal, à savoir celui des arts nègres. Le Festival panafricain était une réponse pour dire que le panafricanisme ce n’est pas une question de couleurs, mais de révolution. A la fin du film de William Klein qui est consacré au Panaf 69, on entend « que la culture africaine sera révolutionnaire ou elle ne le sera pas ». 50 ans après, on aurait pu poser cette question, faire le bilan. Puisqu’il y a eu 40 ans après, un deuxième Festival panafricain en 2009. Que reste-t-il de ce festival ? A-t-on des centres de recherches en commun ? A-t-on une plate-forme de travail, y a t-il un Prix littéraire africain par exemple ? Y a-t-il un échange ? Ce qui reste est cet espace, l’Esprit Panaf dont la vision, je n’ai rien contre Mme Bekkat- a changé. Ce n’est plus la même démarche. Nous, on arrache les livres de chez les universitaires pour les donner aux gens. Pour préserver ce lien. Les choses ont changé depuis 2009. A l’époque, le Mali était en paix, la Libye aussi, le Congo, le Mozambique …Il y a aujourd’hui des attentats terroristes là-bas. Il y a tout un changement qui s’est opéré. La réalité de l’année 69 est différente de celle de 2009 tout comme cette dernière est différente de celle de 2019. A-t-on vraiment mis les moyens ? A-t-on vraiment écouté les professionnels ? Toutes ces questions auraient été l’occasion pour nous de faire un bilan

Pendant le salon ?
On aurait fait le bilan des traductions par exemple. En discutant avec le directeur de Papyrus, Seydou, il a été impressionné par la qualité de l’impression des livres en Algérie. Il ne savait pas qu’on avait un centre de formation des arts et des métiers graphiques. Ils n’en ont pas au Sénégal. On a eu une rencontre avec le conseiller de l’ambassade du Sénégal qui est ravi et qui a émis l’idée que des étudiants en arts graphiques ou dans les métiers de l’impression puissent venir ici faire des stages. Il faut se l’avouer, depuis 2003 et vu la production des livres, les imprimeurs algériens se sont quand même améliorés.

Ceci rentrerait donc dans le cadre des échanges...
Oui, bien sûr. Pourquoi les échanges doivent-ils rester strictement économiques dans le sens de vendre une marchandise de façon ponctuelle et seulement au moment du salon ? On peut vendre aussi un savoir-faire, faire cet échange-la, échanger dans les idées. C’est cela une richesse d’un continent. C’est cela notre problème. Au lieu de dresser un bilan positif et négatif, on se met à tout mélanger. L’erreur qu’on a faite, je l’ai déjà dit, c’est qu’en nommant quelqu’un comme commissaire d’un festival ou d’un salon de livre, s’il n’y a pas de feuille de route, - Je ne parle pas de censure- mais pour donner de réels objectifs à ce salon. Que veut-on en faire ? Quels sont les secteurs qu’on veut renforcer ? Quels sont les secteurs de collaboration qu’on veut créer par exemple ? A chaque fois on fait table rase des expériences, qu’elles soient bonnes ou pas et on redémarre. Dans notre cas on fait aussi l’impression, on réalise des livres pour les éditeurs subsahariens. Les sénégalais sont intéressés. On réalise des livres pour le Mali. On a fait une expérience avec le Cameroun, le Bénin aussi et on a fait une expérience avec le Congo-Brazzaville (RDC). Cela veut dire que le secteur du livre peut rapporter de la richesse. On ne veut pas rester toujours avec les mêmes problèmes des mille exemplaires qu’on n’arrive pas à écouler alors qu’on a un marché extraordinaire. Dans l’Algérie même, nous avons une très bonne qualité d’auteurs compétents

Un dernier mot ?
Je dirais la même chose qu’avant : « La culture sera révolutionnaire ou elle ne sera pas. » Sinon, je peux vous informer qu’il a été lancé aujourd’hui un appel d’un certain auteur auquel je me suis associé. Il s’agit du « front de libération des classiques africains ».
Cette année c’est le centenaire de Dib. Et pour ce dernier, les éditeurs algériens font appel pour acheter les droits aux éditeurs français. Un centenaire où on n’est pas capable de faire ça …
Il ne s’agit pas de couper l’édition française. Elle se développe sans nous, elle va très bien. Mais, on veut faire les choses à partir de nous. C’est important.

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