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Le dilemme d’être élu à 84,99%

Bouteflika a donc eu «l´écrasante majorité» qu´il n´a cessé de réclamer avec insistance tout au long de la campagne électorale. Le résultat a été un plébiscite ! Un plébiscite qui a confondu toutes les analyses émises ici et là ces dernières semaines. Faut-il s´en féliciter? Est-il temps de s´en offusquer? A l´évidence cela n´est pas aussi simple. S´en féliciter? Ce serait le cas s´il est avéré que cela va rétablir la légitimité de pouvoir dont souffre l´Algérie. S´en offusquer? Certes, d´autant que le scrutin dégage un arrière-goût d´amertume tant semble enraciné dans le tissu social algérien le concept de l´homme fort conforté par l´imagerie populaire du «père du peuple». Deux donnes extrêmes en vérité fort peu élogieuses pour l´idée de citoyenneté que l´on pensait commencer à s´ancrer parmi le peuple. En réalité, le chemin de la citoyenneté reste long et parsemé de chausse-trapes. En démocratie, ce qui est excessif est souvent peu signifiant et le taux de 84,99% est par trop «parlant» pour réfléchir une logique induite par les mutations qu´a connues la société algérienne cette dernière décennie. Aussi, le suffrage exprimé laisse-t-il quelque peu perplexe. Que le président sortant soit réélu dès le premier tour, n´est pas là le problème, cela a été une hypothèse forte que nombre d´analystes prenaient en compte dans leurs conjectures, nonobstant le fait que d´aucuns estimaient, aussi, qu´un second tour n´était pas invraisemblable du fait de la bonne tenue de campagne des concurrents du président sortant. Dès lors, «l´effondrement» des adversaires de M.Bouteflika, singulièrement la déroute d´Ali Benflis, pourtant crédité d´une excellente campagne électorale, ne s´explique pas et ne laisse d´étonner. Ne serait-ce qu´au fait que le premier mandat du président réélu, outre d´avoir été marqué par des émeutes à travers de nombreuses wilayas du pays, a vu la crise de Kabylie s´enliser, le chômage augmenter et la paupérisation de la population s´accélérer (sur 32 millions d´Algériens 14 millions vivent sous le seuil de pauvreté, révèle une récente étude du Cnes), n´a pu voir se matérialiser, par ailleurs, aucun des projets de réformes programmés. Aussi, à la veille du scrutin était-il recensé plus de déception que de satisfaction et, les uns dans les autres, les faits ne plaidaient pas pour le triomphe du 8 avril... Dès lors, il est patent que l´effet d´entraînement, d´une part, un conservatisme latent, de l´autre, ont dû peser largement et lourdement dans la réélection de M.Bouteflika. Mais cela n´explique pas pour autant l´ampleur d´un taux qui avait toutes les allures d´une «allégeance des Algériens», au président réélu, comme le note à-propos un journal arabophone. Le peuple a tranché, certes, mais cela ne doit pas pour autant interdire d´essayer de comprendre. En fait, avec ce taux «normatif», d´aucuns restent sceptiques et peinent à être convaincus de la validité de la chose. En réalité, un raz-de-marée électoral n´a pas de signification politique probante et relève le plus souvent de l´émotionnel, qui ne reflète pas, et ne peut représenter les tendances et pulsions qui travaillent en profondeur la société algérienne. Or, loin d´être aussi lisse, la société algérienne, comme l´a montré la dernière décennie, est traversée par des courants politiques qui entrent de plain-pied avec ses mutations vers le stade de la démocratie et de la citoyenneté. En d´autres termes, la consultation électorale du 8 avril renvoie à plus tard la question de la légitimité de pouvoir en Algérie par ce retour, à tout le moins réducteur, au vote consensuel. 84,99%, un taux qui en dit beaucoup ou trop peu. De fait, trop bien élu constitue un peu l´envers de mal élu. En effet en 1999, il était dit que M. Bouteflika, mal élu, souffrait d´un déficit de légitimité, en 2004, très bien élu il risque, paradoxalement, d´être confronté au même dilemme de légitimité. Comme quoi à vouloir trop bien faire on peut retomber dans les travers qu´il fallait éviter. Dans sa première déclaration à la nation, M.Bouteflika s´est engagé à être le président de tous les Algériens ! Dès lors, il lui appartient de convaincre qu´il représente le bon choix et qu´il est prêt à travailler avec la société algérienne dans toute sa composante et sa diversité pour dépasser les contingences qui ont fait obstacle au développement du pays. La prise en charge effective de problèmes prioritaires, crise kabyle, création d´emplois pour les jeunes, notamment, la consolidation de la démocratie par la garantie des libertés, sont autant de tests qui diront si en effet le peuple ne s´est pas trompé dans son choix. Bouteflika II a aujourd´hui les moyens d´imposer les réformes qui, pour une raison ou une autre, ont avorté sous Bouteflika I. De fait, M.Bouteflika aura chaque jour à établir qu´il est l´élu de tous les Algériens et que, si revanche à prendre il y avait, elle doit l´être contre le sort qui s´acharne sur ce pays.

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