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C... comme correspondants

Hafnaoui Ben Ameur Ghoul correspondant d´El Youm à Djelfa a été rejugé hier et entame sa deuxième semaine de prison, au moment où sept plaintes et deux mandats de dépôt, lui tombent sur le dos. Au début de l´année, c´est son collègue d´El Bayadh, Hassan Bouras, qui fait l´expérience de l´enfermement entre quatre barreaux. L´an dernier, c´était au correspondant d´El Watan à Annaba, A. Djebali, de faire l´objet d´un mystérieux kidnapping pour réapparaître aussi mystérieusement. Le journaliste, fortement traumatisé par son aventure, en garde des séquelles. Plus grave encore, ce qui est arrivé à Abdelhaï Beliardouh, correspondant d´El Watan à Tébessa, en prise avec les potentats et mafia locaux. Agressé, mis sous pression, Beliardouh a fini par recourir à l´irréparable, mettre un terme à sa vie. Ce sont là quelques-uns des cas de harcèlement les plus récurrents et des entraves auxquels font face les journalistes correspondants pris dans le piége des notabilités et des potentats locaux, souvent intouchables. Aussi, ce qui arrive à Hafnaoui Ghoul, - au directeur du journal El Waha de Ghardaia, Nedjar El Hadj Daoued, à leurs nombreux confrères correspondants, que l´on ne peut tous citer ici -, qui ont eu maille à partir avec les notables de leurs lieux de résidence, est-il sans doute, le prix à payer par le journalisme local, de même que ce combat a-t-il comme finalité de réhabiliter et de redonner sa place véritable à l´actualité «provinciale» laquelle constitue en réalité l´épine dorsale du journalisme, tant il est vrai que c´est au niveau du village, du hameau et du douar que se situent les pulsions profondes de la société. Le correspondant local a ce privilège d´introduire le lecteur dans sa condition sociologique immédiate, ce que ne peut faire, à l´évidence, la presse, dite nationale, plus concentrée sur les évènements politiques et économiques nationaux. Toutefois, celle-ci a comblé ce manque, ces dernières années, par l´ouverture de pages au journalisme local, faisant du correspondant un acteur de premier plan certes, mais aussi très vulnérable, comme on l´a vu avec la fin tragique de Beliardouh. En fait, le journalisme local spécifique n´a commencé que récemment à prendre sa signification réelle par sa contribution à la mise à bas de certains bastions qui se sont édifiés à l´ombre de la corruption et du passe-droit. Aujourd´hui, avec le développement des supports de la presse, l´accès de plus en plus important du citoyen à l´information, notamment avec l´amélioration de la distribution, le journaliste correspondant se trouve propulsé en première ligne du combat pour les libertés, devenant, par un curieux retournement des perceptions, l´homme à abattre. Et c´est bien le cas de le dire, si l´on argue de la disparition tragique du regretté confrère Beliardouh, de même que des condamnations à la prison de Hafnaoui Ghoul et de Hassan Bouras, comme des menaces pesant sur de nombreux directeurs de journaux, à l´instar de Mohamed Benchicou du Matin. En réalité, et ceci peut expliquer cela, dans l´esprit de beaucoup de dirigeants du pays, la presse n´est pas, ou ne peut être, l´un des vecteurs obligatoires de la construction de l´édifice républicain. De fait, un défenseur des libertés, dont le nom m´échappe, avait à juste raison affirmé, je cite de mémoire, que la presse est «l´arme offensive de la démocratie et l´arme défensive de la monarchie». C´était en France au XIXe siècle. Dans l´Algérie de 2004, nous en sommes encore là. Contrairement à son confrère de la capitale, le correspondant local est souvent pris en étau dans la nasse du cercle étroit du village où tout le monde se connaît, une ouverture à toutes les corruptions car, souvent, il n´a pas la faculté du choix de ses armes. Et lorsqu´il le fait, nous avons des victimes, comme hier, Beliardouh et aujourd´hui Ben Ameur Ghoul. C´est encore plus vrai lorsqu´on habite une ville comme Djelfa, l´une des cités les plus indigentes d´Algérie, où le poids des tribalismes et des traditions pastorales font d´elle une ville en état de suspension de développement. Aussi, en divulguant quelques-uns de ses secrets, Hafnaoui Ghoul s´est quasiment mis «hors la loi» de la cité, (voir les innombrables plaintes le concernant et la série de mandats de dépôt délivrés contre lui), les Djelfaouis reprenant à leur compte l´axiome qui dit «laissez dormir les secrets, nous ne voulons pas savoir, ce que nous ne savons pas». Pourtant l´affaire des bébés de Djelfa ne pouvait rester sous silence car elle défrayait la chronique par cet incroyable concours de circonstances, qui ne peut être une simple coïncidence, qui fait que 13 bébés meurent dans des conditions obscures sans que les autorités sanitaires locales trouvent à y redire. Aussi, le journaliste-correspondant peut-il se suffire du panégyrique des «notables» et potentats locaux alors que ses lecteurs attendent de lui qu´il les informe sur les évènements localisés? Aussi, l´information dans laquelle le correspondant joue un rôle important, est-elle devenue une exigence de l´ordre de la cité car c´est à ce niveau que se construit la démocratie et un citadin ou un villageois informé, est un citoyen en puissance.

De Quoi j'me Mêle

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