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Massacre au tuyau

Les violences faites aux femmes ne cessent de semer la zizanie dans les foyers...

C’est devenu presque banal d’évoquer, dans nos nombreuses salles d’audience des juridictions du pays, les disputes dans les familles. Et encore !
Un jeu de photographies montrant les monstruosités des mauvais traitements subis par les femmes. Mais, cette fois- ci, les acteurs ne sont nullement des couples en guerre, comme nous avons pris l’habitude d’en voir, mais d’un frère et sa sœur aînée qui sont debout à la barre, afin de narrer chacun à son tour, les faits.
Il s’agit, selon l’ordonnance de renvoi, d’un gros malentendu né à la suite d’un coup de fil donné dans la chambre de la maman par Fathia. R. qui aurait appelé une copine pour, semble-t-il, demander des infos autour des cours du lendemain. Merzak R. n’avale pas les arguments de la frangine qui s’énerve d’abord devant tant de curiosité, autour d’un sujet qui ne regarde ni de près ni de loin le frère. Il répond qu’il est ici à veiller sur l’honneur et le nif de la famille. C’est alors que la fille perd son sang-froid et remet à sa place le « gosse » ! Et c’est le cri de guerre du cadet. Il s’empare du premier objet qui lui tombe sous les yeux, en l’occurrence un gros tuyau d’arrosage en plastique et corrige la pauvre fille qui ne dut son salut qu’à la prompte intervention de la maman qui a crié son désarroi de voir ses deux enfants se battre sous ses yeux.
Le grand et longiligne frangin est là. Cette dernière porte une minerve, qui laisse croire plutôt à un accident de la circulation, qu’autre chose. Son conseil est à sa gauche, tout près, si près, qu’on aurait dit qu’elle s’apprêtait à lui souffler quelques bribes de syllabes à l’oreille.
La juge lance un œil derrière la victime et aperçoit une vieille femme meurtrie aux aguets. « Que faites-vous ici, El Hadja ? Votre place est sur le banc. Rejoignez donc la place qui vous réservée, voulez-vous ? Votre fille est assez mûre pour s’exprimer et expliquer au tribunal ce qui s’est passé », dit d’un ton neutre, la magistrate très bien dans sa peau, ce dimanche de novembre 2019. Elle aborde le côté coups et blessures volontaires qui ont valu à la jeune fille un arrêt de travail de 16 jours. Et la loi prévoit de sévir contre les auteurs de cet acte inqualifiable, émanant d’un frère à l’encontre de sa sœur aînée ! La faute est ainsi doublée !
Les violences volontaires sont prévues et punies par l’article 264. (loi n° 06-23 du 20 décembre 2006) dont elle cite, à dessein, de larges passages concernant ce dossier :
« Quiconque, volontairement, fait des blessures ou porte des coups à autrui ou commet toute autre violence ou voie de fait, et s’ il résulte de ces sortes de violence, une maladie ou une incapacité totale de travail pendant plus de 15 jours est puni d’un emprisonnement d’ un (1) à cinq (5) ans et d’une amende de 100 000 DA à
500.000 DA
Quand les violences ci-dessus exprimées ont été suivies de mutilation ou privation de l’ usage d’un membre, cécité, perte d’ un œil ou autres infirmités permanentes, le coupable est puni de la réclusion à temps, de cinq à dix ans.. » C’est dire si le législateur a pris toutes les dispositions relatives à l’auteur de toute agression, afin d’éradiquer la violence, celles notamment faites aux femmes, aux épouses, aux mères et à toutes celles qui osent tenir tête à « l’homme ».
La magistrate veut gagner du temps. Elle passe de suite, après avoir noté la brève intervention du procureur qui a demandé une peine d’emprisonnement de six mois ferme, à ce qu’elle considère le moment le plus important du procès. Elle regarde l’inculpé longuement dans les yeux et dit, entre les dents, en articulant très lentement et avec beaucoup de sérénité :
- « Alors, vous n’avez rien à dire à la victime qui n’est autre que votre sœur aînée ?
- Si, si, je suis démonté depuis que je l’ai frappée avec le morceau de tuyau en plastique et je regrette beaucoup ce geste qui ne va plus se répéter, je le jure et…
- Cela ne sert à rien de jurer ici. Il faut que vous sachiez une bonne fois pour toutes que nous jugeons les gens qui ont fauté ! Pas question de nous attendre à des prières et autres incantations. C’est bien d’avoir dit vos regrets. »
La juge demande à la victime si elle a des demandes à faire. Elle dit pardonner à son frère cadet, malgré les mauvais coups au cou.
-« Je passe l’éponge à condition qu’il s’engage à ne plus lever la main sur moi. » La vieille et fatiguée maman acquiesça de la tête...
La juge clame son désaccord après la prise de parole de la fille-victime :
- Il n’est pas question de marchander le pardon. Vous pardonnez, et on n’en parle plus ! » tonne la présidente qui en a assez entendu et annonce la mise en examen de l’affaire.

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