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MORT DE KASHOGGI ET HYPOCRISIE OCCIDENTALE

Choisir entre les dollars et la morale

«Il faut que tout change pour que tout redevienne comme avant.» Phrase célèbre prononcée par Giuseppe Tomasi di Lampédusa dans Le Guépard, film de Luchino Visconti.

Le journaliste saoudien, Jamel Kashoggi, bien en cours pendant toute sa carrière jusqu'en 2017, décide de quitter l'Arabie saoudite et de dénoncer le régime saoudien au nom de la liberté. Situation qui n'a pas gêné quand il était au pays. Curieusement il continue à entretenir des relations avec son pays au point d'aller en Turquie entrer au consulat pour demander des papiers d'identité. Il ne ressortira pas vivant. Pendant18 jours les Saoudiens affirment qu'il est ressorti, jusqu'à hier où ils admettent qu'il y eut une rixe et qu'il en est mort!
Pendant près de 15 jours, les Etats-Unis ont essayé de ménager Mohamed Ben Salman en parlant de services parallèles qui ont outrepassé leurs rôles. Des têtes sont tombées, mais le problème est demeuré entier. D'autant que les Turcs, sans doute «bien informés» par leurs équipements, avancent que le journaliste a été tué, découpé par un médecin légiste qui semble-t-il écoutait de la musique avec un casque quand il «débitait» le malheureux journaliste.
Des sources turques ont déclaré que le journaliste avait été démembré alors qu'il était encore en vie.

Droits de l'homme et ventes d'armes
Les derniers reportages en Turquie sur les dernières heures du journaliste dissident saoudien Jamal Khashoggi ne manquent pas d'estomac. La version la moins atroce de ce qui est arrivé au résident de Virginie âgé de 59 ans implique qu'il a été «battu, drogué et finalement tué au bureau du consul général saoudien» après son entrée au consulat saoudien à Istanbul le 2 octobre. Les autorités turques sont en possession d'un enregistrement audio de l'incident, dans lequel il a été ordonné aux autres membres du consulat «d'écouter de la musique en tant que [médecin légiste] a démembré le corps de Khashoggi». Il y a pires rapports, cependant. Une source a déclaré à Middle East Eye que le spécialiste en médecine légale, Salah Muhammad al-Tubaigy (membre du groupe des 15 tueurs saoudiens envoyés pour rencontrer le journaliste au consulat à Istanbul), «a commencé à couper le corps de Khashoggi sur une table dans le bureau alors qu'il était encore en vie. «Il leur aurait fallu sept minutes pour tuer Khashoggi, qui avait critiqué le prince héritier saoudien Mohammed ben Salman dans le Washington Post. Le Middle East Eye rapporte également que le journal turc Sabah a trois minutes d'enregistrement audio de l'agonie de Khashoggi, mais ne l'a pas encore publié».(1)
Pour Terrence Gray il n'y a pas le feu, les relations sont durables et durent depuis longtemps: Et il est vrai que les relations en matière d'armement entre ces deux pays sont bien établies et lucratives pour les entreprises américaines. Cependant, le président se trompe lorsqu'il affirme que les États-Unis seraient «stupides» d'utiliser ces ventes comme levier auprès des Saoudiens, prétendant qu'ils pourraient obtenir leurs chars et leurs avions de chasse d'autres pays. En fait, c'est l'un des meilleurs arguments de négociation qu'il ait avec le royaume. L'Arabie saoudite a consacré 69,4 milliards USD aux dépenses militaires en 2017, selon l' Institut international de recherche sur la paix de Stockholm, la plus grande organisation de recherche sur les conflits, les armements, le contrôle des armements et le désarmement. Seuls les États-Unis et la Chine ont dépensé plus. Et des sociétés américaines telles que Boeing, Lockheed Martin et Raytheon ont profité le plus de toutes ces dépenses, représentant 55% de ses importations d'armes de 2008 à 2017. En tant que président, Trump espère clairement que l'argent continuera à affluer et l'aidera dans sa campagne «America First «, destinée à créer des emplois pour les Américains.» (2)
«Il n'est donc pas surprenant qu'il ait effectué son premier voyage à l'étranger en tant que président en Arabie saoudite en mai 2017. Au cours de ce voyage, il aurait passé un marché avec le prince héritier saoudien Mohammed ben Salman: Trump ne ferait pas la morale à son royaume à propos des droits de l'homme, et l'Arabie saoudite achèterait plus d'armes américaines. Ainsi, dans l'affaire Khashoggi, il apparaît que Trump est impatient de respecter ses engagements. En défendant cette ligne de conduite, Trump a affirmé que «s'ils ne nous achètent pas [d'armes], ils l'achèteront de Russie ou ils l'achèteront de Chine ou ils l'achèteront. des autres pays.» Avec Khashoggi, Trump choisit de renoncer totalement à cette responsabilité en montrant que sa priorité est purement économique, quel que soit son impact sur la réputation mondiale des États-Unis. À mon avis, une telle stratégie dénuée de sens fait dévier les valeurs américaines et affaiblit la crédibilité mondiale des États-Unis» (2).

L'Arabie saoudite et le mirage de la modernité
Curieusement, la presse occidentale qui a porté aux nues MBS en parlant de modernité d'ouverture, entendez par là abandon des principes islamiques - les Occidentaux ferment les yeux sur le salafisme et même tous les musulmans à l'aune des Saoudiens gardiens de La Mecque- Pour eux c'est du pain bénit de diminuer l'islam. MBS tombait du ciel! Voilà quelqu'un qui s'attaque à des tabous accessoires (conduite des femmes, permission des femmes à aller au stade...). Ils pensent de ce fait à travers «le périphérique» s'attaquer durablement à l'Islam bien compris qui ne s'impose pas aux gens, mais qui s'offre à celles et ceux qui veulent un sens à leur vie naturellement d'une façon tout à fait désarmée et individuelle.
Cependant, comme l'écrit Dominique Moisi: «Pour les Occidentaux, Etats-Unis en tête, Mohammed ben Salmane a représenté l'espoir d'un royaume enfin prêt à devenir fréquentable. Le meurtre barbare de Jamal Khashoggi démontre le contraire. Donald Trump n'en sortira pas indemne. (...) Valeurs ou intérêts, éthique ou realpolitik? (..) Pour la première fois, un jeune prince moderne et plein d'énergie, Mohammed ben Salmane, semblait décidé à s'attaquer aux blocages qui paralysaient l'Arabie saoudite.

Un accord pour clore le dossier
Les pays occidentaux, au premier rang desquels les Etats-Unis, attendaient ce changement dans la ligne politique de Riyadh avec impatience. Comment ne pas être séduit par ce prince si différent, si convaincant - et qui par ses considérables achats d'armements - Impulsif, manquant de maturité peut-être, encouragé certainement par ses relations privilégiées avec Donald Trump et son gendre, Jared Kushner, le prince héritier saoudien a été trop loin.
Pour Abdel Bari Atwan: «Le deal pour clore l'assassinat de Khashoggi est ficelé et l'on commence à chercher un bouc émissaire comme pour Lockerbie. Trump rejette la faute sur des «agents indisciplinés» L'annonce par le roi Salman qu'il a demandé une enquête interne autour de ce crime est une preuve. «Le roi Salman Ben Abdelaziz a dit la vérité car le véritable dirigeant du Royaume est le prince héritier Mohammed Ben Salman. Quel est le prix à payer à la Turquie et aux Etats-Unis pour étouffer ce crime? Que va obtenir le président américain en échange de sa collaboration? Nous ne connaissons pas la somme que va obtenir Trump pour sortir le gouvernement saoudien de ce bourbier, mais elle devrait dépasser les centaines de milliards et il ne fait aucun doute que Pompeo, qui est parti pour Riyadh aujourd'hui, apporte la «facture» détaillée dans ses valises.» (4)
Selon l'éditorialiste de Rai al-Youm, Abdel Bari Atwan, le processus a déjà commencé en Arabie saoudite pour trouver un remplaçant à Mohammed ben Salmane en tant que prince héritier. (...) le processus a déjà commencé. Il cite un article du quotidien The Times selon lequel le renseignement britannique aurait été informé de la possibilité du limogeage par le roi d'Arabie de son fils Mohammed ben Salmane de son poste de prince héritier pour le remplacer par son frère cadet Khaled ben Salmane (30 ans), ambassadeur d'Arabie saoudite aux États-Unis, qui se trouve à Riyadh depuis le début de l'affaire Khashoggi. (5)

L'hypocrisie au grand jour
Les pays européens aphones pour cause de contrat attendaient ce qu'allaient dire les Etats-Unis. Il n'y eut aucune protestation dans l'absolu au nom de la dignité humaine. Ils pensaient même aller au Forum du Désert concocté par MBS dans son hubris de développer son pays au pas de charge alors que les mentalités ne suivent pas.
On s'occupe d'une seule victime, qu'a-t-elle de spécial? Est-ce parce qu'elle vit aux Etats-Unis et que les médias aux ordres en font un tintamarre? Pourtant ce même Occident fait preuve d'un silence de cathédrale s'agissant des meurtres à répétition de 30.000 Yéménites dans une guerre injuste faite à un peuple sans défense. La mort de dizaines d'enfants dernièrement dans deux bus n'a soulevé aucun tollé. Mieux, les enfants yéménites meurent à bas bruit à la fois des bombes du choléra et de la famine par suite du blocus du port.
Jamel Kashoggi n'est pas n'importe qui. C'est quelqu'un qui connaît tout le monde dans le milieu princier. On lui prête même des sympathies pour les Frères musulmans
Qu'est-ce qui gêne dans ce meurtre? la méthode? Mais ce sont les Occidentaux qui sont passés orfèvre en la matière. Toutes les conquêtes coloniales se sont faites en usant et en «abusant» de la torture. Souvenons-nous de la guerre d'indépendance algérienne. Ce fut une torture ininterrompue les Aussarress eurent tellement de «prestige» dans ce milieu qu'il fut invité à être instructeur à Fort Bragg. Quant aux Américains, qu'ils se rappellent de ce qu'ils faisaient à Abou Ghraib, à Guantanamo...
La réalité est que l'Occident veut sauver le soldat MBS, en clair il veut sauver les contrats. La France qui a des contrats d'armes avec l'Arabie saoudite. Des armes qui servent, le dit-on au Yémen, a mis du temps à déclarer qu'elle réclame une enquête exhaustive. On peut reconnaître à Trump sa franchise quand il déclare que s'il sanctionne les Etats-Unis, c'est 120 milliards de dollars qui disparaissent et des milliers d'emplois...

Quelle est la suite?
On peut rendre justice au président Trump de pratiquer la realpolitik, c'est-à-dire pas de sentiment: «America first.» Il nous donne en fait la vraie image de l'Occident fourbe qui veut imposer sa vision du monde en parlant sans croire de droits de l'homme, de responsabilité de protéger, de devoir d'ingérence et autres fumisteries pour habiller de morale la triste réalité de la guerre de tous contre tous et surtout contre les plus faibles.
L'Arabie saoudite fait honte à l'Islam et donnera malheureusement une image encore plus dégradée de l'Islam. Les médias occidentaux ne vont pas bouder leur plaisir pour présenter l'islam sous un jour couleur de soufre. Naturellement, ils trouveront la parade, car ils ont trop besoin du pétrole et des dollars des Saoudiens et de contenir l'Iran pour le compte d'Israël. Ce qu'il y a de sûr c'est que la succession est actée car il faut que tout change pour que tout redevienne comme avant. L'Arabie saoudite reviendra en grâce avec un nouveau MBS, mais avec l'obligation d'être encore plus servile, notamment concernant la politique pétrolière. De sombres jours se profilent pour les producteurs de pétrole de l'Opep. Elle ouvrira grandes les vannes pour compenser le déficit dû à l'embargo contre l'Iran. Avec les dollars supplémentaires, elle achètera plus de biens, plus d'armes, plus de gadgets inutiles en Occident. «Périssent les faibles et les ratés,» clamait Nietzche. Il a mille fois raison.

1. https://www.thisisinsider.com/jamal-khashhoggi-alleged-killing-saudi-consulate-forensic-expert-2018-10
2.Terrence Guay https://theconversation. com/arms-sales-to-saudi-arabia-give-trump-all-the-leverage-he-needs-in-khashoggi-affair-104998
3.Dominique Moïsi Les Echos.fr L'Arabie saoudite et le mirage de la modernité 19/10 2018
4. http://www.alterinfo.net/Un-accord-a-ete-trouve-pour-clore-le-dossier-Khashoggi_a142184.html
5.:http://parstoday.com/fr/news/middle_east-i71969-le_limogeage_de_mbs_a_déjà_commencé
6. https://el-manchar.com/2018/10/20/ daech-denonce-crime-barbare-accuse-larabie-saoudite-detre-honte-terrorisme-international/?

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