{{ temperature }}° C / {{ description }}

Cité introuvable.

Si l'Edition nationale d'antan m'était contée (1er partie)

Victime d'une négation qui ne dit pas son nom, j'ai fini par croire que tous les ministres qui avaient eu à se succéder étaient formatés dans un moule systémique...

J'ai préféré attendre l'ultime journée du Sila pour raconter mon rapport avec l'Edition nationale. Auteur, critique littéraire, libraire, éditeur, producteur audiovisuel, chercheur en ethnomusicologie et fondateur de la Fédération algérienne des ciné-clubs, je n'ai jamais été invité d'une manière officielle par le ministère de la Culture à prendre part à une de ses manifestations. Victime d'une négation qui ne dit pas son nom, j'ai fini par croire que tous les ministres qui avaient eu à se succéder étaient formatés dans un moule systémique... Et on ose encore parler d'idéal démocratique... Je suis venu à l'édition accidentellement. Mon recrutement par l'Entreprise nationale du livre (Sned/Enal) faisait suite à deux licenciements successifs. Le premier, de l'hebdomadaire Révolution Africaine pour appartenance à une organisation clandestine, alors qu'aucune preuve n'avait été produite, le second est intervenu au moment où j'occupais un poste d'assistant au sein d'un établissement de formation universitaire et post-graduée, à la suite de pressions. A quelque chose malheur est bon a-t-on coutume de dire. Et c'est tellement vrai que les huit années passées à la Sned/Enal n'ont pas manqué de me permettre de mûrir et d'avoir raison de bien d'idées reçues.
Des idées où le subjectivisme occupait une place de choix, le pamphlet politique se substituait à une critique littéraire saine et constructive, le plus souvent à l'instigation d'élucubrations foncièrement, pour ne pas dire grossièrement partisanes. Nous pensions connaître le livre, mais la réalité était loin d'être celle assénée par les écrits journalistiques. Il faut reconnaître que le contexte politique de l'époque y contribuait grandement, quand bien même la situation du livre était particulièrement dramatique. Soumise à une crise profonde en raison d'insuffisances techniques, administratives et professionnelles, l'édition nationale se trouvait dans l'incapacité d'honorer ses engagements en relation avec la prise en charge de créations intellectuelles proposées par quelques rares auteurs réguliers dans leur production. Les raisons sont multiples. Ce que ma présence à la Sned/Enal va me permettre de mettre à jour à la faveur d'un audit initié par mes soins à la veille de la prise de fonction officielle en qualité de responsable des éditions en langues étrangères et commerciales. Les délais de lecture, de traitement et de fabrication étaient d'une lenteur impressionnante dépassant à coup sûr l'entendement alors que la réalisation du livre se caractérisait par une certaine indigence sur les plans technique et esthétique. Pourtant, d'énormes moyens techniques avaient été mobilisés par l'Etat, moyens que symbolisait largement le complexe graphique de Réghaïa dont la construction aurait coûté, en 1973, 19 milliards de centimes (à l'époque, 0,64 dinar valait 1FF). Desservie par une planification obsolète, cette infrastructure ne sera opérationnelle qu'en 1979 date à laquelle presque tous les techniciens formés à l'étranger, dans le cadre de ce projet, étaient déjà sous d'autres cieux. Ce qui n'ira pas sans poser des problèmes, problèmes demeurés du reste inextricables durant plusieurs exercices, s'agissant particulièrement de la maîtrise technologique de la gigantesque réalisation prévue pour produire plus de 7 millions de livres par an. Tournant à moins de 20% de ses capacités réelles, le complexe graphique allait constituer pour la société d'édition étatique une sorte de goulot d'étranglement. Alors qu'en temps réel la saisie d'un manuscrit commandait à peine 15 jours, il fallait à ce même manuscrit passer un minimum de sept longs mois à Réghaïa avant d'être confié à la première correction. C'est ainsi que des titres potentiels pouvaient passer jusqu'à 5 ans dans le circuit avant d'être en librairie provoquant irrémédiablement l'ire de nombreux auteurs particulièrement attirés par un système avantageux de droits d'auteur qui leur offrait 25% du prix de vente au tirage. Pour mémoire, cette aubaine n'était pas la seule à être consentie par l'Etat. La politique officielle du livre, dont la devise était que cet outil irremplaçable de connaissance et de culture soit à la portée de tous, avait été fondée sur un soutien financier substantiel à l'importation de 2 milliards 500 millions de centimes. Un soutien que concrétisaient, par ailleurs, l'organisation de séminaires, de foires nationales et internationales, de ventes promotionnelles, la signature de contrats de coédition avec des partenaires étrangers et la réalisation de 1000 bibliothèques à travers le territoire national. A l'évidence, cette politique ne faisait que suivre les recommandations issues du débat sur la Charte nationale. Un débat qui faisait ressortir, une fois n'était pas coutume, le vif intérêt accordé par la société algérienne à la culture nationale, en général et au livre, en particulier. Pour mémoire, de nombreux intervenants mettaient expressément l'accent sur le rôle stratégique du livre dans la dynamique culturelle et l'impérieuse nécessité pour l'Etat de subventionner conséquemment ce secteur. Un secteur qui connaissait un développement tangible à travers le territoire national, la soif de lecture affichée à l'occasion des nombreuses foires internationales, nationales et régionales en était d'ailleurs l'une des plus édifiantes illustrations.

De Quoi j'me Mêle

Placeholder

Découvrez toutes les anciennes éditions de votre journal préféré